06/11/2022
*** AI-JE UNE BELLE RELATION AVEC MON CHIEN ? ***
Nous avons tous déjà entendu cette phrase culpabilisante :
« Quand on adopte un chien, ce n’est pas pour s’absenter et aller travailler toute la journée ».
Nous avons déjà écouté maintes fois des personnes déclarer haut et fort qu’elles emmènent leur chien partout avec elle. Elles passent leurs journées avec lui. Il est donc très heureux.
Et nous restons avec nos questionnements intérieurs…
« Moi qui travaille, ai-je pour autant un chien malheureux? »
En réalité, la question n’est pas tant celle du temps passé avec son chien que celle de la qualité de la relation. Croyez-moi, ce n’est pas la même chose.
QU'EST-CE QU'UNE RELATION ?
On peut considérer que l’on a une relation avec un chien (ou une personne) à partir du moment où l’on a des interactions régulières avec lui (ou elle). Une interaction définit tout acte, tout mouvement, tout comportement à l’attention du chien ou de cette personne. Une relation est donc construite d’une somme d’interactions. Mais évidemment, un total d’interactions négatives aboutira à une relation mauvaise. Alors que des d’interactions positives feront naître une belle relation.
QUANTITÉ OU QUALITÉ ?
La relation et les interactions qui la composent s’observent toujours dans un laps de temps donné. Ainsi, une personne peut passer toute la journée avec son chien et n’avoir avec lui que des interactions désagréables (pour lui). La relation sera mauvaise en dépit du temps et du nombre d’interactions. Ce sont par exemple les humains qui font preuve d’autoritarisme, ceux qui parlent sèchement à leur chien, ceux avec lesquels le chien n’a le droit de rien, ceux qui ne pensent qu’à l’obéissance et ne savent interagir que dans un objectif d’éducation permanente, etc. Une personne pourra également passer toute la journée dans la même pièce que son chien et n’avoir absolument aucune interaction avec lui, comme s’il n’était pas là. Ici, il n’y aura pas de relation du tout. Beaucoup d’humains pensent en effet que leur simple présence dans la maison suffit à rendre leur chien heureux.
Et puis enfin, une personne peut travailler toute la journée et entretenir une belle relation avec son chien car les interactions avec lui sont toujours choisies et agréables. On lui parle gentiment, on se promène avec lui régulièrement, on lui fait confiance dans la liberté, on satisfait ses patrons-moteurs, on lui offre des repas de qualité, on lui donne du choix et du pouvoir de décision, on s’assied près de lui, on le regarde, on lui sourit, on attend son consentement, etc. Quand cette personne rentre du travail, elle n’a avec son chien que des interactions positives et douces. La relation est forte et saine, basée sur le respect mutuel. Pourtant, cet humain s’absente une partie de la journée pour aller travailler.
C’est la vie.
ET LE CHIEN ? QU'EN PENSE-T-IL ?
Pour le chien, la qualité de l’interaction prime sur la quantité. Comme illustration de ce propos qui pourra sembler à contresens de ce qui est souvent raconté, prenons l’exemple de ce berger allemand qui souffrait soit-disant d’ « anxiété de séparation ». Quand le couple retraité rentrait de ses rares absences, il retrouvait toujours des chaises renversées ou des objets cassés par terre. Pour que je puisse observer sa « phobie de la solitude » et son « hyper-attachement », le chien avait été filmé à ma demande. Dans les vidéos, tous les comportements, toutes les postures du chien convergeaient vers la joie, la décharge tant attendue et la détente inespérée. L’euphorie explosait quelques secondes après le départ du couple pour se terminer dans les minutes suivantes par une bonne grosse sieste allongé dans le canapé (évidemment formellement interdit).
Je fus interloquée. Ses humains aussi.
J’appris ensuite par eux que le chien en question avait été dressé à l’obéissance dans un système hiérarchique poussé avec supplément de dominance. Monsieur le faisait beaucoup travailler dans un club traditionnel peuplé d’ « éléphants de l’éducation canine ». Le chien participait à des concours et, en dehors de tous ces moments qui occupaient beaucoup le couple, quasiment aucune place ne restait pour la promenade du chien, la liberté, le jeu, le choix. Il étouffait. Sa vie, en compagnie constante de ses humains, n’était faite que d’ordres, d’exercices, de démonstrations, etc. Ce chien n’était pleinement heureux que quand ses humains passaient la porte pour enfin le laisser vivre. Voici donc une relation remplie de présence, d’interactions et d’activités certes, mais si mauvaise que le chien préfère rester seul. C’est très délicat à expliquer lorsque c’est le cas, mais c’est un fait.
À l’inverse, je connais des dizaines de chiens dont les humains travaillent et qui respirent la joie de vivre et la paix. La relation avec leurs humains est saine et sincère. Le chien est correctement encadré. On le considère comme un être respectable, un membre important de la famille. Le temps passé avec lui fait partie de la vie quotidienne de ces gens actifs. Des petites routines sympas existent entre eux. Ces petites habitudes plaisent énormément à nos chiens, à l’image de la petite histoire racontée à l’enfant avant de dormir.
Ne jugeons jamais la relation qu’une famille ou une personne entretient avec son chien, même si elle travaille et que ce chien reste seul. N’oublions pas qu’il a, comme nous, besoin de solitude. Si ses besoins sont respectés, le chien est capable de faire la part des choses, même si l’idéal serait de passer avec lui beaucoup de temps composé d’interactions de qualité. Mais l’idéal est rarement compatible avec la réalité de nos vies quotidiennes. Et pour la plupart, nous faisons toujours de notre mieux.
Extrait du livre « Le chien, cet animal qui nous échappe », d’Audrey Ventura, disponible ici : https://bit.ly/3t0W9ED
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Coach en comportement
Crédit photo : Valentine Méresse avec Ollie