18/08/2024
Les Maladies Inflamatoires Chroniques de l'Intestin chez le cheval (MICI)
Ou le syndrome du "jus-de-crottins"
Confrontée depuis longtemps à cette pathologie, qui s'aggrave avec l'âge de mon cheval, j'ai du faire beaucoup de recherches (dans la littérature, mais aussi avec mes vétérinaires au travers de pléthore d'examens), essayer de nombreux traitements, et confronter un grand nombre de témoignages pour enfin trouver les solutions de soulagement, en l'absence de médication vétérinaire efficace.
J'ai hésité sur la forme que devrait prendre cette Publication: plutôt "scientifique", au risque de dire de faire quelques imprécisions, car je ne suis pas médecin ni vétérinaire, ou plutôt "témoignage", et donc avec mes mots, en vous prévenant directement qu'il peut se glisser quelques inexactitudes, pour un spécialiste qui me lirait...
Je vais finalement partir sur un mixe des deux: essayer d'être la plus précise et juste possible, exhaustive aussi, tout en restant sur du jargon "accessible", et sur des concepts assez généraux, puisque même a ce petit niveau de connaissance, on peut déjà apporter un énorme soulagement aux chevaux atteints.
Chez l'homme Les MICI sont une famille de maladies inflammatoires de l'intestin (parmi lesquelles crohn et rectocolite), dont on ne comprend pas encore toutes les causes. On sait qu'il y a des facteurs génétiques, environnementaux, mécaniques, immunitaires ...
Mais on a du mal à trouver quelle conjonction exacte de tous ces éléments déclenche une MICI.
Ces pathologies sont structurelles: il n'y a pas un problème de fonctionnement du système digestif (mobilité, motilité...), mais une dégradation du matériel intestinal. La paroi de l'Intestin est enflammée, noduleuse, épaissie, et elle rempli mal son rôle d'absorption de l'eau, et des nutriments.
Il peut aussi y avoir des atteintes de toute autre partie tu tube digestif, de la bouche à l'anus, voir même d'autres organes (yeux, peau...)
Chez l'animal il y a peu de documentations, et encore moins chez les équidés... Mais on commence à parler de MICI aussi chez le cheval, car on constate des symptômes approchants.
En l'occurrence, le symptôme premier, qui déclenche notre vigilance , c'est un écoulement d'eau brunâtre pendant, avant ou après les crottins (qui eux, restent plutôt bien moulés), voir même de manière spontanée, sans crottins. Le cheval a les cuisses souillées, parfois la peau à vif, et rien n'y fait.
Point lexique: on entend de plus en plus parler de "Kotwasser" (KW) , de "free f***l water syndrome" (FFWS), pour designer ces chevaux "qui coulent des fesses". En réalité, cet écoulement peut être le symptôme de beaucoup de pathologies différentes, ou la réponse à plusieurs facteurs de déclenchements différents, sans pathologies sous jacentes.
Comprenez que tous les chevaux KW ou FFWS n'ont pas forcément une MICI.
On voit aussi souvent passer les terme de "syndrome de l'intestin irritable" (SII) , ou "colon irritable" (CI) . Ca par contre, c'est une erreur de vocabulaire, car l'intestin irritable ou le colon irritable ne sont pas des MICIs (encore que les symptômes sont très similaires, mais le SII le CI sont des troubles fonctionnels : c'est le fonctionnement intestinal qui est perturbé, pas la structure).
Et j ai lu aussi le terme "maladie infiltrative du colon irritable"... Ca, c'est un joyeux mélange de tous les termes et une belle confusion sur les troubles...
Lorsque l'on a un cheval qui coule, on a donc un KW, ou un FFWS.. Mais le diagnostique de MICI n'est pas encore posé. Il n'empêche que MICI ou pas, bien souvent les traitements se ressemblent, et il n'y a pas de hiérarchie dans ces pathologies, si ce n'est qu'un simple jus de c**a peut être temporaire, et éventuellement simple à régler, en trouvant sa cause. Si Mici il y a... C'est une autre histoire.
Comment faire le diagnostique, et le diagnostique différenciel ?
Pour un « simple » Kotwasser, c’est-à-dire sans atteinte structurelle de la paroi intestinale :
- l’écoulement est le plus souvent temporaire, et/ou des épisodes reviennent de temps à autre à la faveur de stress, changements …
- on réussit assez facilement à trouver des moyens de le soulager (compléments alimentaires, médication ponctuelle, changements alimentaires …)
- on peut trouver un diagnostique expliquant « le symptôme-jus » (cushing, symdromes metaboliques…), et on pourra alors le soulager, ou non, en traitant la pathologie initiale.
Pour une MICI vraie, on observera d’autres symptômes :
-l'écoulement est permanent, avec plus ou moins d’intensité, mais dans l’ensemble le cheval coule toute l’année.
-aucun traitement ne semble soulager le cheval (vermifugation, transfaunation, compléments divers, exclusions alimentaires ..),ou alors les traitement sont efficaces un moment, puis plus,
-l'écoulement a tendance à empirer avec les années,
-on constate parfois des poussées douloureuses (cheval grognon, ventre dur, fouaillement de la queue, tapage postérieur...)
-les crottins sont de moins en moins bien moulés, voir même si l'écoulement s'accompagne d'une diarrhée aigue
-le cheval a souvent eu des épisodes de coliques …
-le cheval coule davantage sur des fourrages (herbe et foins) durs
-si on observe aussi des écoulements fréquents au niveau des yeux, une faiblesse au niveau de la peau (dermatites régulières, poils ternes, mues difficiles …)
Pour confirmer, il y a plusieurs examens à faire, qui aboutiront sur "une forte suspicion de", mais pas forcement sur un diagnostique péremptoire (dans la mesure où c'est déjà difficile à diagnostiquer fermement chez l'homme, et qu'on commence à peine a en parler chez le cheval).
-Biopsie intestinale, par voie rectale, pour constater les lésions tissulaires
-échographie abdominale ou transrectale, pour voir l'épaississement de la paroie
-coproscopie pour s'assurer que la cause n'est pas parasitaire
-analyse de flore et antibiogramme si nécessaire pour savoir si le microbiote est sain, différent, altéré...
En général ce n'est pas le cas, le microbiote est sain, puisque le probleme ne vient pas de lui. En revanche, la paroie intestinale malade peut favoriser le developpement de bacteries pathogènes qui d'ordinaire restent minoritaires : sporidies, streptocoques, salmonelles...
-et d'autres, qui se font plutôt chez l'homme: vidéocapsule à avaler, coloscopie, entéroscopie, radiographie après absorption d’un liquide radio-opaque...
Et comment soulager un KW ou une MICI ?
Dans l’idéal, on a obtenu le plus tôt possible un diagnostique de MICI, ou d’une autre pathologie déclenchant du KW. Mais en général, on commence par tâtonner, et tous les veterinaires ne font pas tous les examens, ou certaines situations les rendent difficiles … Bref, qu’on soit fixé ou non sur la nature réelle du problème, on sera souvent obligés de procéder par essai-erreur.
Si c’est un KW sans pathologie intestinale, les modifications suivantes peuvent être efficaces :
-essayer de varier les fourrages, les aliments…
-observer l’évolution du syndrome en fonction du lieu de vie, des différentes parcelles …
-être attentif à une variation brusque après un aliment en particulier (carottes, CMVS, grains ….) , une activité, un stress
-le protocole de vermifugation est il rodé ? (la, en cas de KW persistant, je recommande vraiment l'aide d'un vétérinaire pour s'assurer absolument de l'état d'infestation, et des bonnes pratiques de lutte)
-trouver des compléments qui soulagent le problème (psyllium, charbon, aloe verra, guimauve, argile... Je vous laisse trouver les vous-même les nombreux remèdes anti diarrhée et leurs protocoles d’administration).
-une séance d’ostéopathie peut soulager certains maux de ventre de manière efficace, bien que si un blocage est la seule cause, les troubles observables soient relativement limités
Et si c'est une MICI, il faut savoir que c’est une maladie chronique, plutôt dégénérative, qui au mieux sera stabilisée, avec parfois des épisodes de rémission, selon les cas. Comme on ne sait pas exactement d’où viens le problème, que tous les chevaux MICI n’ont pas forcément la même MICI, ni pour les mêmes raisons … il se peut que certains traitements qui conviennent à un individu ne soulagent pas les autres, et inversement.
- LA mesure numéro un, et j'aurai tellement aimé le savoir avant, c'est de changer le fourrage (au sens foin et/ou herbe): plus il est grossier, plus il pique et irrite l'intestin, ajoutant de l'inflammation mécanique à l'inflammation structurelle.
Il faut donc absolument passer sur du petit foin, au sens ou il est très fin.
Souvent, c'est de la deuxieme coupe, ou du foin de montagne... Mais vous devez pouvoir apprecier la différence à l'oeil nu.
Ce foin est tout petit, s'arrache facilement de la b***e ronde (qui s'afesse d'ailleurs direcyement quand vous enlevez le filet), les tiges sont tres fines, souvent courtes, et il y a beaucoup de feuilles.
Pour des diarrhées, c'est contre intuitif, car la plupart du temps (pas toujours), ces foins sont beaucoup plus riche....
Attention: si on a un cheval qui cumule MICI et trouble métabolique (fourbure, SME...)... Ca se corse ! Il faut trouver du foin fin et pas trop riche...
Et heureusement, il y a aussi, désormais disponible chez quasiment tous les fabricants d'aliment, le sacro saint fourrage en sac... Et ça... C'est notre révolution, propriétaires de chevaux MICI... Car les fibres, puisque transformées, y sont minuscules, et donc, on peut choisir un fourrage "pauvre", mais fait à partir de foin dur.
Cette mesure est indispensable, efficace pour une énorme majorité de chevaux MICI, et c'est un soulagement énorme quand on cherche depuis des années.
Il est inutile de chercher des compléments à l'infinie pour soulager, tant que vous n'avez pas changé le fourrage !
Au début il faut faire des essais, entre fourrage fin, fourrage en sac, moitié moitié … mais en général les résultats sont immédiats (24h), et surtout, durables !
Pour les chevaux à l’herbe, on constatera que plus elle est fine, moins ils coulent (à ne pas confondre avec la diarrhée d’herbe : un cheval peut avoir la diarrhée à cause de l’herbe jeune mais ne pas « juter », ou couler avec des crottins moulés), et plus elle monte en tige, plus ils ont d’écoulement. Là encore, si on a un MICI + autre problème métabolique.. bon courage pour trouver le combo parfait …
Pour ce qui est des mesures alimentaires, il est aussi reconnu qu’il faut limiter les aliments riches en amidon, ou tout aliment pouvant favoriser l’acidification du tractus intestinal (carottes, pommes …)
- bien sur, on peut continuer de renforcer et soulager par tous les moyens le système digestif, à l’aide de tous les compléments essayables. Il semblerait quand même que les chevaux MICI n’ont pas une flore intestinale si différente des chevaux sains : c’est la paroi intestinale qui est enflammée, pas le microbiote défectueux. C’est pour cela par exemple que les transfaunations (greffe de flore d’un cheval sain, via des soupes de crottins mis dans l’estomac par sonde) n’ont pas de résultats probants, la plupart du temps. Mais rien n’empeche de renforcer la flore (prébiotiques), d’adoucir le milieu intestinal (aloe verra), d’absorber tout ce qui pourrait ajouter de l’inflammation (argile, charbon…)
- au niveau médical, il y a la cortisone en injection (Rapidexon souvent) ou par voie orale, qui donne de bons résultats sur certains chevaux, et peut stopper efficacement les grosses phases de pousse de la maladie. Il va de soi que c’est un traitement symptomatique (puisqu’on ne connaît rien de curatif), et qu’en donner à vie est compliqué (cout, effets secondaires, logistique …). Mais je vous recommande de ne pas être contre par principe (parce que ce n’est pas naturel toi-même tu sais). Si pour votre cheval, c’est salvateur, au moins pour les phases très douloureuses, il ne faut pas l’en priver. Pour certains chevaux, c’est totalement inefficace.
-Parfois, aux examens de flore on s'aperçoit de la prolifération de bacteries pathogènes.
Il convient donc de faire une antibiotheapie longue, pour assainir la flore... Tout en sachant que le problème est susceptible de recidiver, puisque le milieu intestinal est peu capable de se defendre.
-certains veterinaires commencent à essayer les thérapies humaines sur les chevaux (hors AMM du coup, mais c’est autorisé je cite « en l’absence de solution équivalentes dans la médication veterinaire disponible »). Ce sont des médicaments souvent orientés sur le système immunitaires, je n’en sais pas plus. On a extrêmement peu de retour sur ces essais, mais ils constituent une piste intéressante, et si votre veterinaire est d’accord pour essayer, et trouve cela judicieux … alors tenez nous au courant des avancées !!
La suite de l'article est ici, j'ai du le separer en deux car il est trop long pour que je puisse le publier
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