08/10/2024
Je confiais il y a pas si longtemps à une de mes enseignantes, cette chance et à la fois cette frustration, qui crée une sacrée ambivalence quand on fait beaucoup de débourrage.
A la fois, on apprend à maitriser ses gammes à la perfection, on sait les adapter, les combiner, les prioriser, en fonction de chaque cheval, de chaque physique, de chaque tempérament : on apprend énormément.
Mais il y a aussi cette frustration, de maitriser par cœur ses bases sans jamais avoir vraiment l’opportunité de les pousser plus loin, et oui, on apprend au cheval, on le prépare, à faire un travail de grand, mais quand il est prêt, quand il est apte à passer au niveau supérieur, il repart, chez lui ou ailleurs, pour continuer ses apprentissages, pour rentrer dans le technique.
Et puis il y a cette joie, ce privilège, d’être les premiers pour eux, de vivre avec eux toutes ces premières fois, qui à moi, même après autant de débourrage, me donne toujours le goût d’une première fois, parce que c’est la première fois, pour celui là. Et c’est aussi une chance, de pouvoir leur offrir un début de vie de cheval de selle sain.
Enfin, on est aussi celui qui au travers de ces premières fois, rencontrera les premiers problèmes peut être, physique, matériel, santé... et c’est un rôle aussi délicat et pas très confortable à prendre parfois, que d’être le médiateur entre le cheval et son propriétaire.
Un débourrage c’est énergivore, pour nous, comme pour le cheval, le nombre d’apprentissages à faire pour le cheval est colossal, les changements sont nombreux pour la plupart des chevaux quand ils passent ce cap, et pour tout cela il faut du temps, de la sérénité, de la patience, du travail et de la répétition. Mais aujourd’hui je constate aussi que pour bon nombre de propriétaires, le débourrage c’est une deadline, c’est une pression, une pression de résultat, une pression financière, la suite est déjà écrite souvent, il n’y a pas de place au mouvement, au changeant, au vivant.
Les débourrages me passionnent, ce que les chevaux sont prêt à donner me fascine, mais beaucoup de questions sont en suspend sur la forme que j’ai envie d’y donner aujourd’hui...
Les propriétaires de chevaux non débourré se rendent ils compte que ce n’est pas juste « deux mois de pension travail » à venir ?
Ai je envie de continuer lorsque je sais pertinemment que le cheval ira derrière vers une forme de travail si peu en adéquation avec la façon dont je lui aurais appris ?
Comment équilibrer mon temps passé au débourrage avec celui d’un travail plus avancé sur d’autres chevaux?
Et puis il y a ces premiers montoirs, ces premiers trots, ces premières balades... qui ont toujours un goût unique de première fois.