17/12/2024
Hier, j’ai été mordue.
J’ai été mordue alors que je n’ai rien fait de particulier : j’étais assise à table et je discutais avec des humains sans prêter attention au chien de la maison.
J’ai été mordue alors que je n’avais aucune raison de me méfier : le chien semblait absolument serein, il dormait dans son panier depuis 40 minutes après avoir rongé un peu son bois de cerf. Quand je suis entrée, il est venu me renifler et puis il s’est éloigné tranquillement.
J’ai été mordue, et le chien n’a envoyé absolument aucun signe avant-coureur : pas un regard, pas un grognement, rien.
Oui, mais alors, pourquoi ?
Il s’agissait d’une consultation pour de l’anxiété de séparation chez un chien nouvellement adopté (absolument rien à voir avec de la réactivité, donc). Un malinois, très bien « dressé », très « aux ordres », très « sage », jamais un mouvement de travers, jamais d’excitation. Le chien « parfait », mais qui urine partout dans la maison dès qu’il est seul.
Un chien qui n’exprime rien. Un chien qui intériorise son mal-être et qui le garde pour lui du mieux qu’il peut. Sauf qu’à un moment donné, quand le malaise devient trop grand et ingérable, le chien explose. Et parfois, la goutte qui fait déborder le vase est infime : un de ses humains de référence qui quitte la pièce pour aller à la toilette… Oui, mais après une journée durant laquelle le chien a pratiqué le cani-cross pour la première fois, dans le village qui plus est. Après une balade avec un congénère harceleur. Après qu’une inconnue soit présente dans la maison depuis presque une heure. Après le traumatisme d'avoir été abandonné. Alors oui, après le cani-cross et la balade, et même pendant ma visite, le chien était calme. Mais… A l’extérieur. A l’intérieur, il vivait certainement une tempête d’émotions.
Mais… Pourquoi ?
Considérant le profil du chien et « l’éducation » reçue (sans connaître les moyens éducatifs, attention !), il s’agit très probablement d’un chien qui a été « invité » à se taire. A ne pas s’exprimer. A ne pas grogner. A ne pas s’exciter. A rester passif dans son panier. A être « sage » et à « sa place » … Jusqu’à ce qu’il explose. Bref, une bombe à retardement.
L’hyper-contrôle est dangereux. Disputer un chien qui exprime un malaise est dangereux. Obliger un chien à se confronter à ses peurs (et en silence, s’il vous plait) est dangereux. Pousser un chien à l’impuissance acquise et à la résignation est dangereux.
S’il vous plait… Arrêtez de « canaliser » vos chiens, observez-les pour comprendre les déclencheurs. Arrêtez de contrôler vos chiens, apprenez-leur à prendre les bonnes décisions par eux-mêmes. Arrêtez de pousser vos chiens au silence, écoutez-les. Arrêtez de vouloir des chiens « sages », cherchez comment créer de l’apaisement (du vrai, pas une façade).
Un chien « sage » n’est pas forcément un chien qui va bien. Et parfois, le drame arrive sans qu’on ne le voie venir.