22/03/2024
Re-edit article : Pourquoi j'ai acheté un cheval pas monté depuis 4 ans et que je ne prevois pas de le monter pour le moment?
L'éthologie équine est une science tout comme la médecine: alors si je vous prescrivait une ordonnance de travail au sol pendant un an, tiendrez-vous cet engagement ?
C'est difficile de se faire à l'idée d'essayer pendant une année de sympathiser avec notre cheval pour ce qu'il est et non pas pour ce qu'il nous apporte.
Je vous comprends. On est tous issus du même milieu.
Vous êtes-vous déjà posé la question "comment se serait construis mon affection envers mon cheval, si je n'étais jamais monté dessus?" Serait-elle aussi intime et intense???
Je vais détailler cette pensée ->
Pour faire court, on ne cesse de vanter les mérites et bienfaits du travail a pied, et en liberté au sol.
Mais à l'inverse et ce malgré toutes les opportunités qu'une relation exclusivement au sol nous apporte, rares sont les gens qui ont appris à aimer leurs chevaux, sans passer par la communions qu'offre le fait de les chevaucher. Les gens travaillent au sol, C'EST VRAI, mais entre temps ils montent aussi leurs chevaux. Et surtout rapidement après l'achat...
En effet, cette habitude a forgé les cavaliers à devenir des centaures. Nos corps, superposés, ne font alors plus qu'un. Tels des siamois, les pensées psychiques, les frustrations et les gestes sont combinés. Les jambes du cheval deviennent vos jambes. Vos yeux controlent leur direction, votre stress influence le sien... Et ça crée une relation très rapidement intime. On prend le controle de ses émotions en le rassurant, on pilote ses mouvements pour le calmer en cas d'emballement. Et ce rapport de force (même avec une méthode douce, même pour le bien-être et l'éducation du cheval) est très prétentieux de notre part.
Bien entendu, le fait de bannir bon nombre d'ustensiles, d'inclure le consentemment, de travailler en douceur et dans le respect, fait que ces actions de controles, des mouvements et de l'état d'esprit des chevaux, semblent tout à coup devenir lucratif, éducatif, dans le cas d'une équitation douce, bénéfique et acceptable.
Car si la réponse se fait grâce à une demande, si l'aboutissement se fait uniquement sur consentement et si le travail devient du JEU, cela nous encourage, nous déculpabilise, dans notre rôle d'humain avec notre égo.
MAIS, lorsqu'un horsman fait reculer son cheval, il le fait avant tout dans le but d'obtenir ce qu'il attend. (un reculé et rien d'autre), si vous avez éduqué votre cheval à venir vous tendre le dos au montoir et que vous répétez l'exercice, c'est une action qui vous met vous dans le controle. Même en prétendant être dans le respect de l'animal, la communication, l'éducation, le consentement et le JEU, vous êtes tout de même à la recherche d'une récompense qui viendra satisfaire votre égo en tant qu'humain et ça reste une action de controle, de votre attente à vous, sur l'attitude de votre cheval..
Ceci dit, comment serait notre relation avec notre cheval, si toutes ces actions, si tout ce controle de l'homme envers l'animal n'était mis en place QUE dans une relation exclusivement au sol. Si vous aviez dû apprendre a connaître et aimer votre équidé sans le monter au commencement de l'histoire ? Sans jamais avoir l'intimité de remettre par intermittence notre vie et notre sécurité entre ses oreilles? (sur son dos) De vivre des instants d'émotions ou ses poumons respirent pour nous, ses jambes courent à notre place? L'adrénaline en échange de l'authenticité et du naturel.
En selle, vous êtes habitués à piloter votre cheval par intermittence avec le travail au sol et donc cela a renforcé votre ego et votre intimité avec et cela a forgé votre travail a pied, qui est avant-tout le reflet de votre travail monté.
Mais que serait votre relation intime avec votre cheval concrètement, si vous ne montiez pas dessus de temps en temps?
Comment serait votre relation au sol, si vous n'aviez jamais posé vos fesses sur son dos?
En effet, lors du travail au sol, même si la notion de controle des actions de l'humain envers l'animal est tout aussi présente , ( appellez ça "respect des distances, " de la bulle de chacun" etc), les deux êtres restent tout de même deux entités à part entières et doivent composer avec leurs différences. Vos jambes vous portent vous et votre cheval ne porte que lui sur les siennes. Ainsi vous êtes un humain, tout ce qu'il y a de plus humain, (un peu plus à l'abri) et c'est une autre intimité, plus subtile. Tandis que sur le dos de votre cheval vous êtes un surhomme capable de sauter des obstacles immenses, galoper vite sans à peine vous éssoufler, franchir des flaques d'eau sans vous mouiller, marcher sur des chemins difficiles, sans vous fouler la cheville.. et cet échange "monté" à indirectement modelé votre rapport au sol...
Lors d'un travail au sol et surtout d'un travail en liberté, le cheval, tant qu'ils n'est pas trop conditionné, sera toujours bien plus libre de s'exprimer qu'en selle et d'exprimer son consentement. Votre pilotage envers sa gestuelle, sera un peu plus authentique. Vous serez moins prétencieux parce que vous êtes diminués par votre seul condition physique d'être humain et en étant chacun côte a côte, plutôt que superposés, vos actions et votre controle envers le cheval paraissent tout de suite plus innofensives, c'est pour quoi, je revendique une méthodologie différente.
Pour moi, le travail comportementale commence d'abord par une remise en question intégrale de notre vision du cheval. Apprendre à aimer nos équidés, sans chercher à savoir comment ils se comporteraient si on était assis sur leurs dos? Comment serait notre intimité avec, sans le fait de les monter par intermittence?
Ne faire qu'un, au sol, pendant 1 an, avant de pouvoir reprendre en main le travail monté, fait partie pour moi de l'essentialité de la communication entre l'humain et l'animal.
Beaucoup d'entre nous, vous dirons que simplement inclure aussi souvent que possible du travail au sol, est essentiel. Moi je vous dirais que ce n'est pas suffisant. Aucun travail au sol ne peut être bénéfique s'il n'a pas été votre principale activité pendant au moins une année entière sans subir l'influence du travail en selle. Croyez-moi. Et vous savez, votre cheval n'en deviendra pas plus sauvage, d'avoir passé un an sans cavalier sur le dos. Bien en contraire, aucun travail en selle ne pourrait non plus être plus bénéfique à vous et votre cheval, qu'après une pause totale d'un an, au profit d'un travail et de moments exclusivement à pied.
C'est un peu la chose qui me chagrine le plus, dans le milieu de l'éthologie équine. N'importe quel horseman qui viendra vous faire un stage, abordera rapidement le travail monté, ou l'inclura dans son programme. Alors qu'à mon sens, une année entière de redécouverte au sol, devrait être obligatoire et inculquée, pour beaucoup d'entre nous car cela nous apprend à aimer et découvrir notre cheval avec peu de moyens et plus d'authenticité, moins d'artifices.