19/02/2020
À lire vraiment! 🙏
LE CHEVAL QUI S'EXPRIME ?
On dit tous qu'on veut un cheval qui s'exprime. Un cheval avec de la lumière étincelant ses yeux, un feu intérieur qui brûle, nous rassurant de sa bonne santé mental et physique et puis avouons-le... ils nous en mettent plein les yeux avec leurs spectacles naturels en liberté!
C'est ce qu'on veut, c'est ce qu'on aime. Ça soulage notre cœur et notre bonne conscience de savoir que notre cheval n'est pas robotisé, blasé, qu'il trouve une place presque d’équivalence auprès de nous, qu'il ne ressente pas de jeu dominant/dominé, puisque nous le lisons partout... la hiérarchie inter-espèce n'existe pas, chez le chien comme chez le cheval.
MAIS.
Un cheval qui s'exprime justement, S'EXPRIME. Alors, il dit quoi? Doit-on simplement le regarder ruer et courir dans tous les sens et se satisfaire de cette énergie bouillante en guise d'approbation de notre bonne gestion? Est-ce qu'un cheval qui galope les oreilles écrasées dans le crin, les antérieurs battants l'aire signifie qu'il joue et qu'il dépense son énergie? Est-ce que de participer à cette exubérance avec son cheval durant une séance de travail en liberté signifie une connexion ou un partage? Il joue, donc il est heureux?
Je sais que les gens veulent bien faire et prôner l'expression du cheval c'est beau, on se dit qu'on ne brime pas notre cheval. Mais au-delà de le laisser ''s'exprimer'', qui est une bonne idée, il y a aussi l'écoute et l’interprétation qui compte et qui est trop souvent mis de côté. Ce qui fait alors place au danger. Oui danger, parce que la personne qui ne sait pas interpréter ces comportements peut se blesser avec ces jeux où l'homme ne fait pas le poids, où une ruade est bien vite envoyée. Est ce qu'on veut qu'un cheval s'exprime en ruade et cabriole en fait?
C'est quand j'ai appris durant une formation sur le comportement du cheval, que le cheval ne joue pas vraiment, que j'ai compris. Ok, on respire et ne saute pas aux conclusions : le cheval peut jouer, oui! Mais pas avec des comportements de défense comme plusieurs le croient (en dehors des poulains qui apprennent leur propre langage). Un cheval qui joue le fait dans un certain calme, une certaine économie d'énergie, il n'y a pas de fureur dans leurs activités qui peut cesser à tout moment si un vrai danger se présente à eux. Leurs sens restent en alerte et disponibles, ils écoutent.
Le cheval qui charge, qui rue et pourchasse exprime une anxiété, un stress, une accumulation, un mal-être, vous pouvez choisir le mot qui vous conviens. Une chose est sûre, il ne s'agit pas d'un comportement naturel et sein. Vous ne l’observerez pas dans la nature et dans un troupeau équilibré. Pourquoi? Le cheval doit toujours avoir ses batteries pleines d'énergie si un prédateur se présente et qu'il doit sauver sa vie. Pourquoi gaspillerais-t ‘il celle-ci? Un cheval qui est bien, connais sa place dans son troupeau (humain ou cheval) et y trouve réconfort dans cette stabilité. Oui, il va la valider régulièrement, mais en douceur, juste pour s'assurer que tout est toujours fiable.
Si j'observe mon troupeau, lorsqu'ils jouent, ce n’est jamais pour risquer de se blesser, et le moment ou un facteur extérieur (genre le chien...) se présente, le jeu cesse et ils observent s'il y a danger. Le jeu se présente plutôt sous forme de babinnage, et tester qui fait bouger les pieds de qui avec quelle force d'intention. Lorsque je vois un troupeau qui se déplacent à coup de morsures parfois bien saignantes, de ruades et d'attaques, je ressens un malaise. Quelque chose ne va pas... les chevaux expriment un inconfort dans leur environnement.
Quand c'est en liberté avec un humain c'est encore plus déstabilisant pour moi. Comment le cheval en ai arrivé à exprimer cette fougue négative? Pourquoi cherche-t-il à faire bouger de là cet humain avec autant de comportements de défense? Personnellement, je n'accepterai jamais une ruade dans ma direction, mais je vais fortement analyser son message si cela arrive. Pourquoi j'ai mérité cette menace, où ai-je merdé? Cependant si je dois me rendre à une expression aussi claire, il y a longtemps que j'aurais dut voire les précédents (muscles faciaux, lueurs dans les yeux, le regard fuyants, ses lèvres serrés, sa respiration bloquée...). Analyser le tout et m'assurer que cela n'arrive plus, c'est mon devoir de bon gardien. Je ne chicanerai pas un cheval qui s'exprime puisque cela serait injuste, sauf si cela met ma vie en péril, mais je ne voudrai plus jamais que ça arrive.
Il y a un cheminement à faire. L'homme doit écouter davantage et percevoir son langage subtil, le cheval ré-apprendra à s'exprimer en douceur et sera rassurer que sa voix soit entendue, même dans le silence. Tout le monde peut y arriver, mais il faut que les mentalités changent. Un cheval qui balance une ruade dans ta direction ou part en cabriole ne joue pas, il te parle fort et espère que cette fois tu comprendras.
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Évidemment, il s’agit de mon avis personnel, basé sur des études comportementales ainsi que mon observation. Je n’affirme pas détenir la vérité Absolut, mais c’est la mienne.
Crédit Photo : Lydia Robert