Zachari, l’histoire d’un guerrier noir
L'histoire de Zachari pourrait être un scénario de film, tant il a traversé de lourdes épreuves au cours de sa courte vie. Quand je l'ai accueilli en novembre 2012 alors qu'il avait tout juste 6 mois, j'ai fait la rencontre d'un poulain à l’œil tendre et au cœur doux. Au premier regard, j'ai été charmée par la bonté infinie qui émanait de son expression. Mais c'était sans me douter qu'une telle gentillesse lui porterait préjudice.
À l'aube de son huitième mois, alors que pour son premier hiver, j'ai décidé de le faire rentrer tous les soirs en stabulation avec quelques copains, Zachari se fait bousculer et, par peur, saute la barrière de la stabulation qui mesure pas loin d'1m60. Il couvre la hauteur mais sa rotule heurte l'acier et il se retrouve de l'autre côté, pendu par l'intérieur de la cuisse droite dont la chair se déchire sous son poids.
Le vétérinaire confirmera une convalescence de deux mois en box pour recouvrer une parfaite santé.
À la sortie de l'hiver, il reprend sa vie au pré et passe l'été en troupeau avec hongres et juments, sans manifester le moindre intérêt pour ces dernières.
Le 2 novembre 2013, je découvre Zachari étendu de tout son long hors de son pré. En m'approchant, je vois son postérieur droit ouvert à l'intérieur du canon, la chair arrachée et l'os visible. Heureusement, grâce à un très bon vétérinaire, il s'en sort sans séquelle. Mais lors de sa convalescence, alors que je dois m'absenter durant une quinzaine de jours, quelqu'un le sort sans m'avertir et le lâche avec trois chevaux.
Nouveau coup dur : Zachari souffre d'un décollement musculaire à l'antérieur gauche, pouvant non seulement compromettre sa carrière, mais aussi l'empêcher de marcher convenablement. La convalescence reprend pour 4 mois, dans l'incertitude.
Mais le guerrier noir semble né sous une bonne étoile.
Cela aura été son dernier accident. À l'âge de 2 ans, il comptait trois blessures graves qui auraient pu se résulter par une retraite anticipée, voire une euthanasie si malgré la guérison, des douleurs avaient subsisté. Il a totalement recouvré sa mobilité, et les bilans attestent de son excellent santé.
Je reste convaincue que la vie en troupeau a été un facteur déterminant dans cette volonté acharnée dont Zachari a fait preuve pour cicatriser. Il faut dire que son caractère naturellement tendre et sociable a rendu cette qualité de vie possible. Entretenir un tel tempérament était d'ailleurs une évidence.
Nombreuses sont les structures qui n'accueillent pas les entiers. Parce que la tradition française a pour habitude d'isoler les étalons, elles perpétuent ce qu'elles ont toujours appris. Celles qui ont rencontré Zachari ont cependant constaté qu'avec un mode de vie adapté, le cliché du mâle agressif et irrespectueux n'est plus.
Tout ce qu'a vécu Zachari, ses mésaventures, puis la joie d'entrevoir à nouveau la lumière, ont été autant d'épreuves pour lui que pour moi. C'est sans doute ce qui fait la force de notre lien et la richesse de notre relation. S'il est doux et posé avec ses congénères, il est aussi très respectueux de l'Homme et nombre de professionnels le côtoyant apprécient sa patience et sa gentillesse.
Aujourd'hui étalon et pilier de mon élevage, il confirme ce caractère incroyable et fait mon bonheur tous les jours. Quel plaisir de pouvoir être sincère avec les gens en leur affirmant combien mon cheval est bienveillant. Quelle fierté de voir leurs yeux s'agrandir quand ils constatent par eux-mêmes la galanterie de ce jeune mâle face aux juments qui lui sont proposées.
Nul doute que cette voie dans laquelle il me porte sera merveilleuse. Zachari, c'est non seulement une aventure fabuleuse, c'est aussi l'aboutissement d'un rêve !