13/10/2023
🐾 LES TRAITS « AUTISTIQUES » DU BORDER COLLIE 🐾
Avant toute chose, je tiens à rendre à César ce qui est à César : le fait que le Border Collie présenterait des traits autistiques est une théorie soutenue par Carol Price, comportementaliste canin anglophone et auteure de la trilogie « Border Collies, A Breed Apart », dont j'ai lu le tome 1, « Secrets of The Working Mind ». Ce livre est passionnant pour qui souhaite mieux comprendre la psychologie complexe du Border Collie, et je vous invite vivement à le découvrir si vous partagez votre vie avec un chien de cette race (et que vous maîtrisez l'anglais !).
Jusque très récemment, le Border Collie était une exception en matière de sélection génétique en France : il était la seule et unique race de chien dont l'examen de confirmation se basait obligatoirement sur une épreuve de travail. Il en était ainsi depuis 1977, date de reconnaissance officielle du Border par la Fédération Cynologique Internationale, et même avant cela, les Britanniques sélectionnaient le Border de manière drastique sur ses capacités à être un chien de travail au troupeau efficace. Finalement, le Border n'était pas une « race » définie par un standard physique, mais plutôt un « type » de chien dont on se fichait pas mal de l'allure, sélectionné sur son utilité, un peu comme l'est par exemple l'Alaskan Husky (non encore reconnu par la FCI) pour le mushing. D'où le fait que deux Borders, pourtant de la même race, peuvent être totalement différents physiquement, comme peuvent l'être deux Alaskan. Ce n'est qu'il y a trois ans que la race Border Collie s'est scindée en deux lignées : une lignée « travail », pour les utilisateurs ayant besoin de chiens qui travaillent, et une lignée « beauté », censée être plus adaptée à la compagnie. Tout cela pour que vous compreniez que le Border est resté le même depuis des générations, bien avant sa reconnaissance par la FCI. L'étalon Old H**p, né en 1893 et considéré comme l'ancêtre de la race, ressemble trait pour trait à beaucoup de Border Collies actuels.
Cette petite introduction était nécessaire pour comprendre pourquoi les traits comportementaux caractéristiques du Border Collie perdurent à l'heure actuelle. Quand j'ai été pour la première fois famille d'accueil pour un Border Collie, j'ai été étonnée de constater à quel point le Border fonctionnait différemment des autres chiens. Capacités de concentration supérieures à la moyenne, obsessions, hyper-réactivité aux stimuli auditifs et visuels, hypersensibilité, capacités sociales inférieures à la moyenne, voire désintérêt pour les congénères... Le Border était bien différent des chiens que j'avais l'habitude de côtoyer. Certains me diront que leur Border ne ressemble pas du tout au chien que je décris. En effet, certains individus constituent des exceptions au sein d'une race, mais la sélection génétique fait que, nécessairement, les individus d'une même race présentent des traits comportementaux proches. Encore davantage quand la sélection a été opérée sur les capacités au travail, et donc, sur le comportement du chien. Bref, je trouvais les Borders « à part » dans leur façon de se comporter dans la vie de tous les jours, et il m'arrivait de songer qu'ils présentaient des traits comportementaux proches de ceux des individus humains autistes. Ce n'est qu'il y a quelques mois que j'ai vu cette théorie exposée noir sur blanc, et je l'ai trouvée absolument passionnante.
La sélection sur le travail au troupeau, et notamment le besoin d'obtenir des chiens capables de répéter des schémas de comportements identiques sans se lasser et de présenter des capacités de concentration extrêmes sur une tâche spécifique, aurait développé chez le Border des traits autistiques, plus ou moins prononcés selon les individus. Je rappelle que l'autisme chez l'humain est un spectre, avec, à une extrêmité, des individus présentant des traits autistiques modérés (ce qu'on nommait jusqu'à récemment « Syndrome d'Asperger »), et pouvant mener une vie presque « normale », et à l'autre, des individus aux traits autistiques beaucoup plus visibles et plus handicapants dans la vie quotidienne. Chez le Border, et même chez l'animal en général (si le sujet vous intéresse, Temple Grandin, elle-même autiste et qui a fait énormément avancer le bien-être animal, en parle dans ses écrits), ces traits seront plus ou moins marqués, certains même inexistants. L'individualité prime sur la race, mais les tendances comportementales induites par la sélection sur le travail ne peuvent pas être niées. Voici quelques-uns de ces « traits autistiques » dont je vous parle maintenant depuis trois paragraphes (navrée pour la longueur de l'article, mais il était indispensable de parler sélection avant de parler comportement).
👉 Capacités de concentration extrême
👉 Hypersensibilité au son, à la lumière et au mouvement : vous avez pu remarquer avec quelle fulgurance le Border réagit à une voiture, un vélo ou un coureur qui passe, mais aussi à quel point il semble s'effrayer ou s'agacer en présence de certains bruits. Les bruits peuvent être une source de douleur importante pour le Border.
👉 Hypersensibilité au toucher
👉 Peur ou malaise dans les endroits peuplés
👉 Stress parfois intense lors de changements dans la « routine »
👉 Comportements d'autostimulation : chez l'humain autiste, on va retrouver le fait de se balancer, de se triturer les doigts, de frapper dans ses mains par exemple, et chez le Border, on va retrouver le fait d'être comme hypnotisé par certains jeux de lumière, chasser les ombres, lécher excessivement certaines surfaces, ou encore jouer avec l'eau de boisson... Une liste non exhaustive de comportements visant à provoquer une stimulation sensorielle, gratifiante et apaisante pour l'animal.
👉 Troubles anxieux, et anxiété sociale particulièrement
👉Capacités de communication moins développées que la moyenne des autres chiens : d'où le fait, d'ailleurs, que certains Borders peuvent se promener sans laisse tout en ignorant superbement leurs congénères (soit ils ne sont pas à l'aise avec eux et les évitent, soit ils ne sont tout simplement pas intéressés par les rencontres avec des chiens étrangers).
👉 Besoin de contrôle supérieur à la moyenne
👉 Habitudes alimentaires parfois surprenantes : par exemple, mon jeune Border Sirius fait toujours un quart de tour devant sa gamelle avant de manger.
👉Schémas de comportement répétitifs : un Border peut aisément répéter le même tracé 50 fois par jour pour aller chercher des brebis sans aucunement s'en lasser.
Il ne m'est pas possible, dans un simple article, de détailler toute la liste des traits autistiques chez le Border Collie. Mais il y a longtemps que je souhaitais exposer la théorie de Carol Price sur cette page, car elle me semble très pertinente pour tous ceux qui aimeraient mieux comprendre pourquoi leur Border présente parfois des comportements « bizarres », et pourquoi cette race est rarement adaptée pour ceux qui recherchent un chien aux capacités sociales développées, que ce soit pour la médiation animale par exemple, ou tout simplement pour partager des activités de groupe avec elle. Et dites-vous que, si votre chien adopte des comportements parfois « étranges », c'est avant tout parce que ces derniers étaient nécessaires pour qu'il devienne le formidable chien de troupeau qu'il est encore aujourd'hui, ou parce qu'ils découlent involontairement de la sélection stricte opérée sur la race depuis tant de générations.
Pour en savoir plus, je vous invite à lire « Border Collies : A Breed Apart / Tome 1 : Secrets of the Working Mind », par Carol Price, publié aux éditions First Stone.
Elsa Weiss / Cynopolis Formations
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