14/10/2024
🐾 LA MASCULINITÉ TOXIQUE EN ÉDUCATION CANINE 🐾
Il y a vraiment un gros souci dans le milieu du chien. Un souci dont il est difficile de parler, parce qu’il implique de se mettre une partie de la population à dos. Et pourtant, il est temps que la parole se libère, parce que peut-être qu’évoquer le problème pourra aider des femmes à se sentir plus légitimes dans le milieu canin -et des chiens à être un peu moins maltraités.
Comment se fait-il qu’en 2024, on soit encore obligé d’avoir de gros biceps pour être crédible en éducation canine ?
Comment se fait-il qu’un homme qui en connaît autant sur la psychologie canine qu’un enfant de trois ans, soit plus légitime aux yeux du grand public qu’une femme qui a un doctorat d’éthologie ?
Comment se fait-il que le bagout surpasse les connaissances scientifiques ?
Comment se fait-il que, régulièrement, nos clients masculins ne soient pas présents lors des bilans comportementaux « parce qu’ils savent » ?
Comment se fait-il que, dans un couple, ce soit presque toujours eux qui utilisent la force pour éduquer le chien de la maison ?
Comment se fait-il qu’en cours d’éducation canine, on se voie taxée de « trop gentille », « pas assez autoritaire », et qu’on nous prenne de haut parce qu’on est une femme ?
Comment se fait-il qu’on croie encore qu’un molosse ou un Malinois a besoin d’être « dressé » par un éducateur masculin ?
Comment se fait-il que l’on croise encore tant d’hommes avec des chiens inhibés et qui roulent des mécaniques parce que leur animal les craint ?
Je suis loin d’être une féministe vindicative. Je sais qu’il y a des hommes extrêmement bienveillants avec leur chien, et de très bons éducateurs canins. Il y a aussi des femmes qui sont de grosses bourrines et qui aiment aussi secouer les chiens. Mais il est temps de reconnaître qu’il y a un énorme malaise dans le monde canin, et que les femmes n’y ont pas leur place à égalité avec les hommes. Parce que, si l’on ne montre pas ses muscles, qu’on ne pend pas les chiens par le collier, et qu’on ne fait pas de vidéos clinquantes où l’on doit se mettre à deux pour tenir un pauvre chien en laisse sur fond de musique tout droit sortie de Transformers, c’est que forcément, on est nulle en éducation canine. Si l’on rencontre des difficultés dans l’éducation de son chien, c’est forcément qu’on n’est « pas assez ferme », parce qu’après tout, on n’est qu’une faible femme.
Alors aujourd’hui, je tiens à remercier tous ces hommes qui ne sont PAS comme cela. Tous ceux qui aiment leur chien comme un gosse, qui n’ont pas peur d’adopter une petite voix ridicule pour le rappeler, qui lui donnent un surnom affectueux, qui se promènent avec un petit Spitz ou un Yorkshire sans avoir peur que cela n’entache leur virilité. Tous ceux qui font des câlins à leur chien, qui lui donnent des friandises, qui n’éprouvent pas le besoin de le faire marcher au pas militaire dans la rue pour qu’on admire leur « autorité ». Tous ceux, aussi, qui ne sont pas forcément gagas avec leur chien, mais qui ne lui hurlent pas dessus à la moindre incartade et qui entretiennent avec lui une relation stable et emprunte de respect mutuel. Et puis, il y a de plus en plus d’éducateurs canins formés à des méthodes modernes, qui ont compris que l’éducation bienveillante ne se résumait pas à distribuer des Knackis, et qui savent que comprendre les sciences de l’apprentissage, ce n’est pas une option quand on travaille avec du vivant. Heureusement, des hommes comme cela, j’en croise de plus en plus.
Et ça, c’est chouette ! Parce que ne pas avoir besoin de maltraiter ou de rabaisser pour éduquer, cela montre que l’on n’a rien à prouver à personne, qu’on a compris que brider un chien ou rabaisser une femme c’était juste minable, et que ce n’est pas parce qu’on est gentil et empathique que l’on finit dévoré par des bergers allemands (bravo à ceux qui ont la réf’ 😉 !). Quant aux filles, ayez confiance en vous et ne vous laissez pas intimider par tonton Albert sous prétexte qu’il a eu cinq dobermans et qu’il est donc mieux calé que vous pour dresser les gros chiens féroces. J’ai longtemps eu ce complexe, parce que j’ai souvent entendu dire, avec mes premiers chiens, que je n’étais « pas assez ferme ». Je n’avais surtout aucune connaissance en psychologie canine, je ne savais pas comment un chien apprenait. Maintenant, je n’ai aucun problème avec mes chiens au quotidien, ils sont extra, ils collaborent avec plaisir, et je n’ai jamais besoin de les malmener. Pourtant, devinez quoi ? Je fais la taille d’un Hobbit, j’ai une petite voix douce, et l’autorité d’un bigorneau. Et pourtant, ils ne tirent pas en laisse, reviennent au rappel et ne m’ont pas encore mangée toute crue…
Allez, courage, car malgré tout, les choses évoluent… grâce aux hommes qui savent que les gros bras ne sont pas indispensables dans leur relation avec leur chien, leur femme ou leur enfant.
Et à tous ceux-là, MERCI 🙏 !!!
Elsa Weiss / Cynopolis
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