09/06/2023
Il faut tout un village pour élever un enfant (proverbe africain)
Il faut tout un village pour rééduquer (les comportements d’)un chien/chat
Guerre ou Paix (collaboration) entre les intervenants en comportement animal
J’ai reçu un article de la DH (quotidien belge) du 29 mai 2023 (13h42), dans lequel une vétérinaire comportementaliste (au nom de l’UPV, Union Professionnelle Vétérinaire) vante les compétences des vétérinaires (et la sienne) en comportement, et dénigre les compétences des comportementalistes, disant que ‘’beaucoup n’y connaissent pas grand-chose et sont très mauvais voire dangereux’’.
Oups !
Les coach-comportementalistes-animaliers n’ont pas de diplôme légal, ne sont pas organisés en association professionnelle (avec déontologie, éthique et défense de la profession). C’est vrai.
Il est aussi vrai que n’importe qui peut se décerner le terme ‘comportementaliste’ quelles que soient ses compétences et expériences, non-vétérinaire ou… vétérinaire.
Mais faire une critique négative des comportementalistes non-vétérinaires, et surtout faire une publicité comparative pour les vétérinaires en dénigrant les non-vétérinaires est… pitoyable, manipulateur (et d’ailleurs interdit par la déontologie vétérinaire), mais peut-être une tentative d’assertir sa ‘dominance’… ? 😉
N’est-il pas préférable, dans un constat d’insuffisance d’une profession (voisine et complémentaire), d’aider cette profession à être plus compétente ? C’est ce que j’essaie de faire dans mes formations.
On a besoin de la collaboration de (tout un village de) toutes les compétences pour gérer les problèmes de comportement des chiens et des chats, et de tous les animaux.
Je ne connais pas de vétérinaire comportementaliste (même spécialiste) qui aille sur le terrain, quelque soit le temps, le froid, la chaleur, la pluie, pour apprendre à des propriétaires à faire un conditionnement opérant ou associatif, une désensibilisation… pour un tarif ridicule.
Moi, qui suis vétérinaire ‘spécialiste’ en comportement (psychiatrie, neurologie fonctionnelle), j’ai besoin de comportementalistes (connaissants, compétents, éthiques, bienveillants, dévoués, compatissants), sur le terrain. Sans elles (plus souvent que ‘eux’), le résultat final de mon travail est voué à peu de succès (même si l’aspect médical est géré).
Il faut donner aux comportementalistes (et aux propriétaires d’animaux) des notions de médecine, pour pouvoir suspecter les problèmes médicaux, pour appeler les vétérinaires en collaboration le plus rapidement possible.
Les vétérinaires ont le privilège légal de s’occuper de médecine et de chirurgie. Un(e) non-vétérinaire n’a pas le droit de faire de la médecine. Mais dans certains pays (canton de Vaud, Suisse) un comportementaliste non-vétérinaire, certifié de certaines formations, a le droit d’intervenir sur des cas de comportement de chiens (avec maladie, avec agressivité) en collaboration et supervision d’un(e) vétérinaire (comportementaliste).
Les vétérinaires ont le privilège légal de ‘faire’ de la médecine. En corolaire, ils ont l’obligation de s’occuper des cas médicaux, avec obligation de moyens, et parfois obligation de résultat (comme dans une stérilisation par exemple), avec obligation de consentement éclairé, et obligation d’être informé des dernières connaissances scientifiques en médecine vétérinaire.
C’est dire que quand un vétérinaire s’engage à parler d’éducation et de comportement animal, il engage sa responsabilité professionnelle, et sa responsabilité juridique.
Et comme la quantité de connaissance en médecine vétérinaire augmente de façon exponentielle, il est impossible désormais que chaque vétérinaire connaisse TOUT : c’est pourquoi il y a des spécialisations.
La spécialisation rend la personne de plus en plus compétente à faire de moins en moins de choses. 😉 Mais au moins, il/elle devrait le faire bien.
Les comportementalistes non-vétérinaires ont aussi une responsabilité juridique dans leurs interventions contractuelles. Il/elle ne pourra pas se débiner en justice en disant : ’’je ne savais pas’’ 😉
Que l’on soit vétérinaire ou non-vétérinaire, Il vaut mieux s’engager (consciemment) dans des contrats pour lesquels on a les connaissances, les compétences et l’expérience, et en assumer toutes les responsabilités.
Je plaide pour la collaboration (l’alliance) de toutes les compétences (de tous les intervenants) en comportement animal, chacun enrichissant le groupe ré-éducatif (et thérapeutique) de son domaine de compétence, autour des clients (propriétaires d’animaux familiers).
Comportementalistes vétérinaires et non-vétérinaires, annoncez vos compétences, vos formations multiples, votre éthique, et votre expérience, afin que le client, avec consentement éclairé, contracte avec vous un accord de ‘gestion du comportement’ de son animal familier.
Comportementalistes non-vétérinaires, à la moindre suspicion de trouble médical sur un animal dont vous ‘gérez’ le comportement, signalez votre suspicion au client, et mieux : faites un rapport au client et à sa/son/ses vétérinaire(s). Les vétérinaires seront probablement enchantés de recevoir vos observations de terrain.
Faites la paix, même si on vous propose la guerre.
Dr Joël Dehasse, le 9 juin 2023
Vétérinaire Spécialiste en Comportement (ECAWBM)
Image © Joël Dehasse, 2014.