01/06/2024
Il faut tout un village pour Ă©lever un enfant (proverbe africain)
Il faut tout un village pour rĂ©Ă©duquer (les comportements dâ)un chien/chat
Guerre ou Paix (collaboration) entre les intervenants en comportement animal
Jâai reçu un article de la DH (quotidien belge) du 29 mai 2023 (13h42), dans lequel une vĂ©tĂ©rinaire comportementaliste (au nom de lâUPV, Union Professionnelle VĂ©tĂ©rinaire) vante les compĂ©tences des vĂ©tĂ©rinaires (et la sienne) en comportement, et dĂ©nigre les compĂ©tences des comportementalistes, disant que ââbeaucoup nây connaissent pas grand-chose et sont trĂšs mauvais voire dangereuxââ.
Oups !
Les coach-comportementalistes-animaliers nâont pas de diplĂŽme lĂ©gal, ne sont pas organisĂ©s en association professionnelle (avec dĂ©ontologie, Ă©thique et dĂ©fense de la profession). Câest vrai.
Il est aussi vrai que nâimporte qui peut se dĂ©cerner le terme âcomportementalisteâ quelles que soient ses compĂ©tences et expĂ©riences, non-vĂ©tĂ©rinaire ou⊠vĂ©tĂ©rinaire.
Mais faire une critique nĂ©gative des comportementalistes non-vĂ©tĂ©rinaires, et surtout faire une publicitĂ© comparative pour les vĂ©tĂ©rinaires en dĂ©nigrant les non-vĂ©tĂ©rinaires est⊠pitoyable, manipulateur (et dâailleurs interdit par la dĂ©ontologie vĂ©tĂ©rinaire), mais peut-ĂȘtre une tentative dâassertir sa âdominanceâ⊠? đ
Nâest-il pas prĂ©fĂ©rable, dans un constat dâinsuffisance dâune profession (voisine et complĂ©mentaire), dâaider cette profession Ă ĂȘtre plus compĂ©tente ? Câest ce que jâessaie de faire dans mes formations.
On a besoin de la collaboration de (tout un village de) toutes les compétences pour gérer les problÚmes de comportement des chiens et des chats, et de tous les animaux.
Je ne connais pas de vĂ©tĂ©rinaire comportementaliste (mĂȘme spĂ©cialiste) qui aille sur le terrain, quelque soit le temps, le froid, la chaleur, la pluie, pour apprendre Ă des propriĂ©taires Ă faire un conditionnement opĂ©rant ou associatif, une dĂ©sensibilisation⊠pour un tarif ridicule.
Moi, qui suis vĂ©tĂ©rinaire âspĂ©cialisteâ en comportement (psychiatrie, neurologie fonctionnelle), jâai besoin de comportementalistes (connaissants, compĂ©tents, Ă©thiques, bienveillants, dĂ©vouĂ©s, compatissants), sur le terrain. Sans elles (plus souvent que âeuxâ), le rĂ©sultat final de mon travail est vouĂ© Ă peu de succĂšs (mĂȘme si lâaspect mĂ©dical est gĂ©rĂ©).
Il faut donner aux comportementalistes (et aux propriĂ©taires dâanimaux) des notions de mĂ©decine, pour pouvoir suspecter les problĂšmes mĂ©dicaux, pour appeler les vĂ©tĂ©rinaires en collaboration le plus rapidement possible.
Les vĂ©tĂ©rinaires ont le privilĂšge lĂ©gal de sâoccuper de mĂ©decine et de chirurgie. Un(e) non-vĂ©tĂ©rinaire nâa pas le droit de faire de la mĂ©decine. Mais dans certains pays (canton de Vaud, Suisse) un comportementaliste non-vĂ©tĂ©rinaire, certifiĂ© de certaines formations, a le droit dâintervenir sur des cas de comportement de chiens (avec maladie, avec agressivitĂ©) en collaboration et supervision dâun(e) vĂ©tĂ©rinaire (comportementaliste).
Les vĂ©tĂ©rinaires ont le privilĂšge lĂ©gal de âfaireâ de la mĂ©decine. En corolaire, ils ont lâobligation de sâoccuper des cas mĂ©dicaux, avec obligation de moyens, et parfois obligation de rĂ©sultat (comme dans une stĂ©rilisation par exemple), avec obligation de consentement Ă©clairĂ©, et obligation dâĂȘtre informĂ© des derniĂšres connaissances scientifiques en mĂ©decine vĂ©tĂ©rinaire.
Câest dire que quand un vĂ©tĂ©rinaire sâengage Ă parler dâĂ©ducation et de comportement animal, il engage sa responsabilitĂ© professionnelle, et sa responsabilitĂ© juridique.
Et comme la quantitĂ© de connaissance en mĂ©decine vĂ©tĂ©rinaire augmente de façon exponentielle, il est impossible dĂ©sormais que chaque vĂ©tĂ©rinaire connaisse TOUT : câest pourquoi il y a des spĂ©cialisations.
La spĂ©cialisation rend la personne de plus en plus compĂ©tente Ă faire de moins en moins de choses. đ Mais au moins, il/elle devrait le faire bien.
Les comportementalistes non-vĂ©tĂ©rinaires ont aussi une responsabilitĂ© juridique dans leurs interventions contractuelles. Il/elle ne pourra pas se dĂ©biner en justice en disant : ââje ne savais pasââ đ
Que lâon soit vĂ©tĂ©rinaire ou non-vĂ©tĂ©rinaire, Il vaut mieux sâengager (consciemment) dans des contrats pour lesquels on a les connaissances, les compĂ©tences et lâexpĂ©rience, et en assumer toutes les responsabilitĂ©s.
Je plaide pour la collaboration (lâalliance) de toutes les compĂ©tences (de tous les intervenants) en comportement animal, chacun enrichissant le groupe rĂ©-Ă©ducatif (et thĂ©rapeutique) de son domaine de compĂ©tence, autour des clients (propriĂ©taires dâanimaux familiers).
Comportementalistes vĂ©tĂ©rinaires et non-vĂ©tĂ©rinaires, annoncez vos compĂ©tences, vos formations multiples, votre Ă©thique, et votre expĂ©rience, afin que le client, avec consentement Ă©clairĂ©, contracte avec vous un accord de âgestion du comportementâ de son animal familier.
Comportementalistes non-vĂ©tĂ©rinaires, Ă la moindre suspicion de trouble mĂ©dical sur un animal dont vous âgĂ©rezâ le comportement, signalez votre suspicion au client, et mieux : faites un rapport au client et Ă sa/son/ses vĂ©tĂ©rinaire(s). Les vĂ©tĂ©rinaires seront probablement enchantĂ©s de recevoir vos observations de terrain.
Faites la paix, mĂȘme si on vous propose la guerre.
Dr Joël Dehasse, le 9 juin 2023
Vétérinaire Spécialiste en Comportement (ECAWBM)
Image © Joël Dehasse, 2014.