30/11/2021
Dure réalité que d apprendre une fois de plus le départ d une consœur.
Hier, le Dr Evelyne Dossin, une consœur de Binche, a encore décidé de mettre fin à ses jours. Elle n'avait pas 50 ans.
Nous faisons le plus beau métier du monde, mais nous sommes le métier le plus suicidaire en Belgique. Il est de plus en plus insupportable d'apprendre tous les mois qu'un confrère ou une consœur a encore décidé d'arrêter de vivre. Cela doit cesser!
Ami vétérinaire, confrère, consœur, si ton métier devient un fardeau, s'il te plaît, arrête à temps. Il y a toujours un solution. Nous sommes une famille, ce ne sont pas que des paroles.
Amis des animaux, s'il vous plaît, prenez soin de vos vétérinaires. Ils sont fragiles. Ils ont besoin de vos retours positifs et de votre soutien. Leur quotidien n’est pas toujours aussi rose qu’on l’imagine. En ces temps d’hyper communication, bon nombre d’entre nous sont victimes de lynchages sur les réseaux, d’abus, de chantage affectif et financiers, … qui sont invivables (au propre comme au figuré) pour certains.
Chère famille d’Evelyne, nous vous adressons nos plus tendres et sincères condoléances 💐
Ci dessous le texte d'un confrère à la jolie plume pour crier notre peine…
« Décidément...
Décidément, il y a des jours qu'on devrait enjamber, juste les ignorer. Mieux, peut-être, les empêcher d'être. Aujourd'hui, par exemple.
Comme tant d'autres, qui s'accumulent.
Ces cases de calendrier funestes qui deviennent « dates du souvenir » d'un ami, d'une consoeur, d'un vétérinaire, d'une praticienne qui nous a quitté par accident, suite à une maladie ou, bien plus douloureux encore, par choix.
Aujourd'hui, c'est Evelyne.
Pas une amie, certes. Mais celle de nombre d'entre-nous. Pas une amie, je ne la connais pas personnellement.
Mais une soeur, quelque part.
Nous avons partagé les mêmes bancs, les mêmes amphis, les mêmes rires, les mêmes stress d'examens (quoique je soupçonne Evelyne d'avoir été plus brillante et à l'aise que moi en ce domaine).
Surtout, nous vivons, elle, moi, vous tous, une même passion, une même vocation : nous sommes vétérinaires.
Prenante, cette passion. Normal, c'est notre vie.
Ou plutôt, elle fait partie de notre vie.
Elle en est un moteur. De ces machines ronflantes que savent produire les descndants du Commendatore Ferrari, qui vous propulsent vous, votre famille, vos amis, votre vie sur les routes du bonheur.
Du moins, elle devrait le rester, en toutes circonstances.
Pour Evelyne, comme pour tant d'autre, il y a un moment de stupeur, un réflexe de rejet face à la disparition.
NON !
Et puis, POURQUOI ?
Pourquoi, alors que nous avons choisi ce plus beau métier du monde, en arrive-t-on à une telle hécatombe ?
Bien sûr, il y a eu des enquêtes sur notre degré de bonheur et d'épanouissement personnel.
Bien évidemment, le « métier » évolue sans cesse; chacun s'y adapte à sa manière.
Forcément, nous connaissons des échecs, des désillusions, mais pour combien de joies, de moments inoubliables.
Assurément, notre liberté de manoeuvre et de « changer de vie » est un peu plus relative que ce que l'on pourrait croire : tout recommencer pour trouver du mieux, c'est un peu « vers l'infini et, parfois, l'au-delà »!
Malheureusement.
Alors, je me pose la question : ne sommes-nous pas, toutes et tous, des êtres hypersensibles, bourrés d'idéaux et d'empathie dissimulée sous un cuir de timidité ? N'est-ce pas cela qui nous a mené sur la voie de la fac' puis du terrain quel qu'il soit ? Si c'était juste « la science » ou « l'amour des animaux », nous aurions pu choisir médecine, bio, pharmacie voire, pour les extraterrestres, chimie ou physique.
Mais non, nous sommes vétérinaires.
Et sensibles, en effet. Parfois trop, peut-être.
Du coup, quand une partie de notre idéal se terni ou se brise, cette « corde sensible » qui nous anime peut se tendre jusqu'à la rupture.
Devrions nous pour autant nous blinder d'une armure de cynisme et nous contenter d'être des bêtes de travail âpres au gain ?
Je ne le crois pas.
Je n'ai aucune solution à cela, j'en suis profondément révolté.
Dans ce monde d'hypercommunication, le silence de la solitude est assoourdissant. Comment tant d'oreilles, tant de regards peuvent-ils passer à côté de ces cris inaudibles, de ces pleurs invisibles.
N'oublions jamais nos amis, nos connaissances, nos frères et soeurs vétérinaires...
Une porte ouverte, un café ou trois Val Dieu font plus de bien que des caisses de 'zépam.
Au revoir, Evelyne,
Frédéric. »