04/25/2024
Je partage cet article car, comme plusieurs intervenants, je suis consultée pour accompagner des clients qui ont des éditions spéciales. Tout comme ce chien dans cet article et pour qui l’histoire se termine malheureusement tristement car nous n’arrivons pas a rendre ces individus équilibrés et sécuritaires pour tous, chiens et humains. Et oui, au Quebec aussi il y a des gens qui s’improvisent éleveurs et font n’importe quoi 😔
L’élevage, tant qu’à moi, devrait être approché comme un métier. Oui, un métier de passion où il faudrait se former pour éviter le plus possible des histoires très tristes comme celle ci .
Une pensée tout particulière pour deux clients que j’affectionne particulièrement pour avoir tellement investi en temps et argent, mais, pour qui, malgré tout, ce ne fut pas assez ….🤍
Nathalie
*** TATRAS, LE CHIEN RÊVÉ ***
Race, prénoms, lieux ont été modifiés.
L’histoire est racontée à des fins de sensibilisation d’ordre public pour que le rêve d’enfance cesse de devenir notre cauchemar.
Tatras est un chiot berger de Podhale que ses gardiens sont allés acquérir dans le sud de la Pologne, là où ses parents et sa lignée travaillent depuis des générations à la protection des troupeaux. Tatras porte le nom de la chaîne de montagne où il est né. Il était destiné lui aussi, à devenir un jour un grand protecteur de troupeaux contre le loup, l’ours et le lynx qui cohabitent avec les bergers depuis la nuit des temps.
Mais l’histoire de Tatras est intimement liée à celle de Tiphaine et Stéphane, un couple de jeunes mariés ayant professionnellement bien réussi. Parisiens depuis toujours, ils décident d’acheter une maison individuelle en banlieue, agrémentée de 600 mètres carré de terrain, un véritable trésor par chez eux. Cette pépite immobilière est logée dans un quartier familial où ils pourront construire leur vie. Dans ce tableau bien pensé, il manque un petit détail. Tiphaine est d’origine polonaise et depuis son enfance, elle rêve d’adopter un berger de Podhale. Depuis toujours, elle remet son projet a plus t**d, avec beaucoup de patience. Lorsqu’ils auront leur maison, Stéphane et elle iront en vacances en Pologne pour acheter « un vrai Podhale », issu d’une lignée ancestrale de chiens de protection.
À ce stade de la réflexion, si l’on demande à Tiphaine ce qu’est un « chien de protection », elle répondra à peu près correctement, sans vraiment prendre conscience de ce qu’elle dit. Elle sait que ces chiens protègent des êtres vivants au péril de leur propre vie, et qu’ils ont besoin d’espace.
Elle a une grande maison avec un « terrain », elle n’a pas d’enfant, elle compte se consacrer pleinement à l’éducation de son futur chien par renforcement positif… Elle s’y voit déjà… Tiphaine n’a absolument pas idée de l’erreur qu’elle va commettre et de son ignorance stratosphérique. Et comme toutes les personnes dans le même cas (car Tiphaine n'est pas un cas isolé), elle ne demandera conseil que lorsqu’il sera bien trop t**d.
De l’immensité des plaines de Silésie, Tatras est donc parachuté dans une belle banlieue parisienne. Dans sa première année, il mordra dix personnes, dont Stéphane qui, depuis les sept mois de son chien, n’a plus le droit d’approcher sa femme.
Tatras n’a rien d’autre à protéger à part Tiphaine, et l’environnement dans lequel on l'a placé est beaucoup trop stimulant. Tatras, Kangal, Patou… ont besoin d'espace oui, mais aussi de calme, et de travail de protection et de surveillance à longueur de journée. Alors, loin des troupeaux des plaines de Silésie, la génétique de Tatras lui impose de protéger quelqu’un : Tiphaine, et de surveiller quelqu’un : Stéphane.
Je ne vais pas y aller par quatre chemins, Tatras a été euthanasié. Il y a eu l’attaque de trop, celle qui conduit au dépôt de plainte et à l’évaluation comportementale d’un chien qui n’avait rien à faire là, avec ces personnes-là, pour vivre cette vie-là, comme ça.
Tiphaine pensait lui offrir de l’éducation positive, du calme et de l’espace parce qu’elle vit dans une maison de banlieue sur 600m2… Seulement les notions de Tiphaine d’espace et de calme sont radicalement différentes de celles d’un Tatras, qui, soit-dit-en passant, n’a que faire des tricks à la croquette. Aux yeux de Tatras, la propriété était un mouchoir de poche, et Tiphaine était devenue sa ressource à protéger coûte que coûte.
À longueur de journée, parce que la configuration des lieux le lui permettait, il en faisait le tour, voyait des intrus passer devant sa maison, longer ses grilles, les toucher, des voitures se garer devant sa porte cochère, des enfants jouer près de ses murets. Pour Tatras, c’était du domaine de l’intolérable.
Sur-stimulé, stressé, sans véritable travail pour une génétique qui lui intime de remplir une mission de la plus haute importance, Tatras est devenu hyper-agressif, dangereux et incontrôlable avant l’âge de deux ans. Il a attaqué un passant au moment où il sortait de chez lui pour être promené.
Mais pour Tatras, devant chez lui, en face de chez lui, et tout autour de chez lui, c’était chez lui, et il a cru devoir protéger Tiphaine de cet inconnu qui passait.
Il l’a payé de sa vie.
Il est sûrement mieux là où il est désormais.
À Tatras et à tous les chiens d'utilité qui font rêver.
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Audrey Ventura
Cynoconsult
Photo libre de droit d'un berger de Podhale.