04/01/2025
Un texte plein de bon sens... Comme l'a très bien dit aussi M. Dehasse, la bienveillance est une éthique et non pas une technique... soyons bienveillants envers nos chiens, envers nos clients, mais aussi envers nos confrères et consœurs qui font de leur mieux. Belle année à toutes et tous ✨️
🔹 Et un peu de bienveillance envers l’humain aussi… ? 🔹
De nos jours, grâce à la facilité du jugement via les réseaux, on peut se faire lyncher publiquement parce qu’on utilise le leurre pour enfiler le harnais à un chien. Ou parce qu’on se sert d’un tapis de léchage pour pratiquer un soin – une « méthode pansement » au lieu des sacro-saints soins coopératifs, quelle horreur ! Ou parce qu’on récompense avec une b***e (ou une croquette). Ou parce que notre chien, pendant une manipulation, émet des signaux de gêne (sans pour autant quitter sa position de consentement). Ou parce que notre chiot se trimb***e toujours avec une cordelette sur son collier/harnais. Ou, ou… La critique est facile et partout, surtout sur un sujet où les conseils et méthodes sont parfois diamétralement opposés. Mais le plus inquiétant, c’est que, même dans une même veine, comme dans le courant de l’éducation « positive » ou disons non-fondée sur la punition, la raillerie et la violence verbale sont prêtes à surgir sous chaque séquence ou pensée partagée.
Sans être partisane du « si ça marche (vite), c’est good » (bonjour les amis tradi), peut-être que nous pourrions prendre un peu de recule avant de nous jeter toutes dents dehors lorsque nous voyons quelque chose qui ne colle pas à notre vision du monde de l’éducation canine.
D’accord, peut-être que nous pourrions proposer le harnais au chien et renoncer à le lui mettre s’il refuse, en partant du principe que le seul choix suffise avec le temps à améliorer la situation, mais si ce loulou est hautement réactif ou tire vraiment très fort et sans discontinuer en laisse/longe ?
D’accord, un brossage proposé à un chien hyper détendu, les quatre fers en l’air, serait idéal, mais si ce chien craint les brosses, a vraiment besoin qu’on le toilette et qu’il accepte beaucoup mieux le soin avec un Lickimat sous le nez ?
D’accord, la b***e met le chien dans un état d’éveil haut, peut devenir addictive, anime son instinct de poursuite, peut amener le chien à se blesser si son corps était froid avant de courir derrière, mais si l’humain a énormément entraîné le passage d’un état émotionnel à un autre, dose correctement ses sessions de jeu après échauffement systématique, joue avec des règles claires, et qu’en plus la b***e est ce qui a le plus de valeur pour le chien et lui permet de prendre la décision attendue (face à un déclencheur, par exemple), reste-t-il encore vraiment quelque chose à redire ?
D’accord, le principe et l’objectif des soins coopératifs est de pouvoir manipuler/soigner un chien parfaitement à l’aise, car il sait qu’il est libre de participer ou non et qu’il sera de toute façon récompensé, mais s’il faut lui couper les griffes toutes les semaines, qu’il choisit de rester en posture « feu vert » tout en émettant des signaux d’inconfort, faut-il forcément arrêter et être considéré comme maltraitant car nous avons « ignoré » sa communication ?
D’accord, dans l’idéal, un chien ne serait jamais entravé dans ses mouvements (là, on tombe déjà dans l’utopie) et nous n’aurions pas besoin de réduire son champ d’action pour le ramener au calme après une balade (parce qu’il vivrait dans le cadre parfait pour lui, avec des humains sans défaut, sans autre animaux à déranger), mais si notre chiot ne sait pas se poser de lui-même, court partout au rez-de-chaussée, détruit/mastique sans s’apaiser, ennuie nos autres animaux, nous rend irritable voire explosif à cause de son attitude ? Ne vaut-il pas mieux le garder en laisse près de nous avec de quoi s’occuper pour qu’il évite de s’auto-alimenter dans le mouvement, augmentant ainsi sa fatigue et son agitation ?
A l’heure ou l’immense majorité des chiens est encore totalement incomprise par sa famille, non respectée dans ses besoins par méconnaissance, crier au scandale devant des techniques facilitant la vie à un duo pour une problématique me semble réellement ennuyeux.
Nous avons des principes, des idées – elles nous sont propres et c'est très bien ainsi.
Nous avons aussi le devoir de chercher à mieux faire, à évoluer avec l’expérience, pour augmenter le niveau de confort du chien (puis le nôtre) dans son quotidien et ses entraînements.
Mais, derrière nos écrans ou même dans la vraie vie, la vérité est que nous ne savons rien du binôme que nous regardons. Nous jugeons le gardien du chien attaché au collier qui tire comme un forcené. Mais si, pour CE chien, le harnais n’était juste pas possible, pour le moment, tellement il lui faisait peur ? Si son inconfort à la vue du matériel était plus grand que la tension qu’il met sur la laisse, peut-être seulement les cinq premières minutes de balade que nous avons vues ? Ou s’il était blessé au poitrail et ne pouvait pas en porter pendant une période définie ? Ou s’il s’agissait d’un très gros chien que son humain n’arrive à (re)tenir qu’avec ce matériel ? Face à un problème, une situation, il n’existe pas une unique solution idéale, mais plutôt tout un tas de possibilités dont il faut jauger les avantages et les inconvénients, au cas par cas, au nom du bien-être de tous – parce que le fait que l’humain vive lui aussi correctement la situation a une importance.
Nous n’arrivons alors pas à la perfection, c’est un fait. Nous arrivons à un compromis, plus ou moins acceptable, très possiblement amené à changer vers du mieux, si nous avons conscience des limites de ce qui est mis en place de façon provisoire.
Viser la lune, oui, mais il faudrait tout de même savoir s’adapter aux conditions présentes, tout à fait terre à terre. A la vraie vie du moment, en fait.
Je crois que nous devrions d'abord chercher à être dans le plus de confort possible face à une situation immédiate donnée : pour ce chien, avec cet humain, à cet instant, compte tenu de ces antécédents. Tout ce à quoi nous n’avons pas accès quand nous regardons une vidéos d’à peine deux minutes ou une mini scène de vie en croisant une personne et son animal.
Il est quasi certain que nous pouvons trouver à redire sur tout ce que nous voyons, mais il serait judicieux de faire preuve d’un peu de bienveillance, d’empathie et d’analyse pour se demander, à chaque fois, si ce qu’on observe n’est pas qu’une étape, un pis-aller, le mieux qu’on pouvait proposer à l’instant T.
Une philosophie, une éthique, une manière de vivre avec le chien et de le considérer ne se résume pas en un aperçu.
¤ Photo : Nash par Antoine Herino ¤