02/12/2024
Plutôt que d'interdire, de stopper un comportement non désiré, créons de nouvelles compétences.
« 𝐓𝐮 𝐥𝐚𝐢𝐬𝐬𝐞𝐬 »®
Le retour de l’autoritarisme en tout positif ? 😥
Le retour de la coercition masquée ? 😓
𝘙𝘦́𝘧𝘭𝘦𝘹𝘪𝘰𝘯 𝘱𝘩𝘪𝘭𝘰𝘴𝘰𝘱𝘩𝘪𝘲𝘶𝘦 𝘦𝘵 𝘦́𝘵𝘩𝘪𝘲𝘶𝘦 𝘦𝘯 𝘯𝘦𝘶𝘳𝘰𝘴𝘤𝘪𝘦𝘯𝘤𝘦𝘴 𝘥𝘶 𝘭𝘢𝘯𝘨𝘢𝘨𝘦 🤔
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« 𝙏𝙪 𝙡𝙖𝙞𝙨𝙨𝙚𝙨 »® est bien, en français, une phrase injonctive qui est une modification autoritaire de « laisse ça/arrête ça », traduction de l’anglais « leave it », qui se retrouve dans la collection d’injonctions : « drop it », « stop it », « no »…
Entre « laisse ça » et « tu laisses », il y a une différence d’intensité dans la coercition : l’auteur de l’injonction interdit au chien (chat, enfant, humain…) de réaliser un acte pendant la séquence de (l’intention de) l’acte (comportement).
Si le « laisse ça » est 𝐬𝐮𝐠𝐠𝐞𝐬𝐭𝐢𝐟, le « tu laisses »® est 𝐢𝐦𝐩𝐞́𝐫𝐚𝐭𝐢𝐟.
Le « tu laisses » qui stoppe une séquence de comportement, rentre bien dans la définition de la théorie de l’apprentissage que :
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𝘜𝘯𝘦 𝘤𝘰𝘯𝘴𝘦́𝘲𝘶𝘦𝘯𝘤𝘦 𝘱𝘦𝘯𝘥𝘢𝘯𝘵/𝘢𝘱𝘳𝘦̀𝘴 𝘶𝘯 𝘤𝘰𝘮𝘱𝘰𝘳𝘵𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵 𝘲𝘶𝘪 𝘱𝘦𝘳𝘮𝘦𝘵 𝘥𝘦 𝐫𝐞́𝐝𝐮𝐢𝐫𝐞 (𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘦 𝘧𝘶𝘵𝘶𝘳 𝘱𝘳𝘰𝘤𝘩𝘦) 𝘭’𝘪𝘯𝘤𝘪𝘥𝘦𝘯𝘤𝘦 𝘥𝘦 𝘤𝘦 𝘤𝘰𝘮𝘱𝘰𝘳𝘵𝘦𝘮𝘦𝘯𝘵 = 𝐏+/-
Cela serait plutôt du «𝐏-» puisque la conséquence désagréable est la 𝘧𝘳𝘶𝘴𝘵𝘳𝘢𝘵𝘪𝘰𝘯 de ne pas pouvoir accomplir le comportement intentionnel.
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On me dira que c’est enseigné en «𝐑+» et que le chien est payé pour stopper son comportement et qu’on associe un ‘cue’ « tu laisses »® (en conditionnement associatif) pour signifier cette interdiction de façon symbolique…
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Je vous dirai que le chien s’en fout du ‘cue’ utilisé : « laisse ça », « tu laisses », « non », « stop », « lâche », ou même que vous utilisiez un mot quelconque ou une onomatopée « zut », « oh là là », «tic toc » ou un sifflement, ou un grognement ou un chantonnement… ou même que vous utilisez un mot au sens paradoxal « prends », « garde », « tiens » …
Le chien s’en fout du vocabulaire utilisé parce qu’il ne comprend pas le français (ni l’anglais…).
Il le comprend par 𝐚𝐬𝐬𝐨𝐜𝐢𝐚𝐭𝐢𝐨𝐧 avec un acte ou un non-acte et un contexte.
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𝘓𝘦 𝘱𝘳𝘰𝘣𝘭𝘦̀𝘮𝘦 𝘱𝘩𝘪𝘭𝘰𝘴𝘰𝘱𝘩𝘪𝘲𝘶𝘦 𝘦𝘵 𝘦́𝘵𝘩𝘪𝘲𝘶𝘦 𝘥𝘶 𝘭𝘢𝘯𝘨𝘢𝘨𝘦 𝘩𝘶𝘮𝘢𝘪𝘯 𝘦𝘴𝘵 𝘲𝘶’𝘪𝘭 𝘴’𝘢𝘥𝘳𝘦𝘴𝘴𝘦 𝘢𝘶𝘹 𝘩𝘶𝘮𝘢𝘪𝘯𝘴 𝘦𝘵 𝘦𝘴𝘵 𝘤𝘰𝘮𝘱𝘳𝘪𝘴 𝘱𝘢𝘳 𝘭𝘦𝘴 𝘩𝘶𝘮𝘢𝘪𝘯𝘴.
Vous qui êtes des éducateurs-comportementalistes experts, vous apprenez aux humains des chiens que vous utilisez un modèle d’injonction-interdiction-frustration-autoritaire avec le chien.
Et vous annoncez que c’est fait en positif, voire en ‘tout positif’ parce que vous donnez une (poignée de) friandise au chien pendant/après l’acception d’arrêt.
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Ce qui me gêne dans « tu laisses », ce ne sont pas les bonnes intentions de l’éducateur d’apprendre au chien un peu de frustration, le contrôle de soi, ou d’arrêter son chien dans des comportements qui pourraient lui être dommageables comme manger des choses toxiques, traverser la rue à la poursuite d’un chat/gibier (c’est évidemment indispensable d’apprendre au chien à stopper un comportement dommageable, pour sa sécurité et celles des humains et bravo de faire ça en ‘tout positif’), 𝐜𝐞 𝐪𝐮𝐢 𝐦𝐞 𝐠𝐞̂𝐧𝐞, 𝐞́𝐭𝐡𝐢𝐪𝐮𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐞𝐭 𝐩𝐡𝐢𝐥𝐨𝐬𝐨𝐩𝐡𝐢𝐪𝐮𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭, 𝐜’𝐞𝐬𝐭 𝐥𝐞 𝐫𝐞𝐭𝐨𝐮𝐫 𝐝’𝐮𝐧 𝐥𝐚𝐧𝐠𝐚𝐠𝐞 𝐝’𝐚𝐮𝐭𝐨𝐫𝐢𝐭𝐞́ 𝐞𝐭 𝐝’𝐢𝐧𝐭𝐞𝐫𝐝𝐢𝐜𝐭𝐢𝐨𝐧.
Pourquoi ne pas dire au chien ‘𝐪𝐮𝐨𝐢 𝐟𝐚𝐢𝐫𝐞’ plutôt que de lui dire ‘𝐪𝐮𝐨𝐢 𝐧𝐞 𝐏𝐀𝐒 𝐟𝐚𝐢𝐫𝐞’ ?
Pourquoi ne pas lui dire « regarde-moi », « va à gauche », « cherche par terre », « prends la b***e »… qui lui permettrait (s’il l’a appris par association) de savoir par quoi 𝐫𝐞𝐦𝐩𝐥𝐚𝐜𝐞𝐫/𝐬𝐮𝐛𝐬𝐭𝐢𝐭𝐮𝐞𝐫 𝐥𝐞 𝐜𝐨𝐦𝐩𝐨𝐫𝐭𝐞𝐦𝐞𝐧𝐭 𝐢𝐧𝐭𝐞𝐫𝐝𝐢𝐭 ?
Cela lui permettra également d’écouler le surplus d’émotion qui vient de la frustration d’arrêt d’un comportement par obligation du maître (redevenu maître d’esclave, au lieu de maître d’école…)
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Le cerveau humain créé de manière réflexe des images à partir du langage verbal utilisé : si je vous propose (et c’est une suggestion, pas une injonction) « ne pensez pas à un éléphant rose »… combien d’entre vous qui avez lu cette phrase n’ont pas eu un flash avec un éléphant (rose) ?
Quand vous enseignez « tu laisses »® à un humain, il reçoit l’image, le verbal et le paraverbal de l’interdiction, synonyme de «non» et il voit ‘l’arrêt de l’action’.
Quand vous enseignez « regarde-moi », « prends la b***e »… l’humain reçoit l’image de ce qu’il va enseigner à l’autre (autre = chien, humain…).
Vous pouvez certainement enseigner une chaîne « laisse ça » > « regarde-moi » > « prends la b***e »…
Lecteur : 𝘮𝘢𝘪𝘴 𝘤’𝘦𝘴𝘵 𝘤̧𝘢 𝘲𝘶𝘦 𝘫𝘦 𝘧𝘢𝘪𝘴…
Dr D : alors pourquoi ne pas le dire ?
Lecteur : 𝘱𝘢𝘳𝘤𝘦 𝘲𝘶𝘦 𝘵𝘰𝘶𝘵𝘦 𝘭𝘢 𝘤𝘩𝘢𝘪̂𝘯𝘦 𝘦𝘴𝘵 𝘤𝘰𝘯𝘤𝘦𝘯𝘵𝘳𝘦́𝘦 𝘥𝘢𝘯𝘴 𝘭𝘦 ‘𝘤𝘶𝘦’ « 𝘵𝘶 𝘭𝘢𝘪𝘴𝘴𝘦𝘴 »…
Dr D : alors, s’il vous plaît, changez le ‘cue’ pour que la phrase injonctive n’ait pas de sens pervers pour les humains et qu’ils ne puissent pas s’imaginer que vous êtes de retour dans le modèle coercitif (annoncé comme du R+, parce que masqué par des friandises).
Pourquoi ne pas utiliser une onomatopée du genre « tictoctac » pour coder une chaîne comme « je stoppe, je laisse, je fais autre chose » (qui me donnera satisfaction du patron-moteur frustré + du plaisir + de la joie + du relationnel avec mon humain en +) ?
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Trouvez-vous que je pinaille sur ces deux mots « tu laisses » ? Que je discours sur des broutilles ? 😄
J’ai juste peur que, malgré cette belle avancée de l’éducation éthique, respectueuse et positive, la Nature d’Homo Sapiens ne revienne avec ses tendances irrespectueuses, autoritaires, coercitives, punitives, frustrantes comme on le voit dans les médias de grande écoute qui font à nouveau le marketing des éducateurs coercitifs…
J’ai juste peur des 𝐝𝐞́𝐫𝐢𝐯𝐞𝐬 du « tu laisses » enseigné par des 𝐧𝐨𝐧-𝐢𝐧𝐢𝐭𝐢𝐞́𝐬.
J’ai juste peur que cela entraîne la 𝐟𝐫𝐮𝐬𝐭𝐫𝐚𝐭𝐢𝐨𝐧 𝐝𝐞𝐬 𝐛𝐞𝐬𝐨𝐢𝐧𝐬 physiologiques et des 𝑏𝑒𝑠𝑜𝑖𝑛𝑠 𝑞𝑢𝑎𝑛𝑡𝑖𝑡𝑎𝑡𝑖𝑓𝑠 𝑑𝑒𝑠 𝑝𝑎𝑡𝑟𝑜𝑛𝑠-𝑚𝑜𝑡𝑒𝑢𝑟𝑠-𝑐𝑜𝑚𝑝𝑜𝑟𝑡𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡𝑠, ce qui deviendrait une maltraitance.
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🧔🏻Dr Joël Dehasse, le dimanche 1er décembre 2024
🤗Lolita Candotti-Besson (pour l’accessibilité et la bienveillance du langage) 😉
📖Note : j’ai mis un ® derrière « tu laisses »® parce que je crois qu’il y a un auteur à cette injonction, qui pourrait être une ‘marque déposée’, et je n’ai malheureusement pas retrouvé son nom pour le/la référencer.
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Image © Dr Joël Dehasse