17/12/2024
Bientôt Noël et son lot de cadeaux. Parfois le père Noël vous apportera un chiot. Je ne reviendrais pas sur le fait qu’un animal n’est pas un cadeau que l’on fait mais un cadeau que l’on se fait. Adopter un chien ou un chat doit être un acte réfléchi car c’est un engagement sur le très long terme.
Bon, imaginons que malgré tout, vous trouvez une petite boule de poils au pied du sapin. Quels sont les premiers conseils que je vais pouvoir vous donner avec mon regard de vétérinaire comportementaliste.
Je me limiterai à 3 points fondamentaux du développement comportemental du chiot :
La socialisation à l’espèce canine, l’apprentissage du langage canin et la sociabilisation à l’espèce humaine voire aux autres espèces animales qu’il sera amené à côtoyer.
L’habituation à l’environnement dans lequel il va vivre
L’acquisition des auto-contrôles.
Petit rappel, l’essentiel du développement comportemental du chiot va se faire entre l’âge de 3 semaines, début de la capacité de se déplacer et l’âge de 4 à 5 mois environ, en fonction des races. Plus le chiot sera de grande taille adulte plus son développement sera lent. Passé cet âge, la plasticité comportementale diminue. Or, le plus souvent un chiot est adopté à l’âge de 2 mois, 2 mois et demi. Le temps restant pour bien faire les choses est donc très court.
Tout commence par les quelques semaines où le chiot va être avec sa mère entre l’âge de 3 semaines et l’adoption. Encore faut il qu’il soit avec sa mère ou avec d’autres adultes régulateurs. C’est la période des premiers apprentissages : les auto-contrôles c’est-à-dire la capacité d’interagir avec les autres, essentiellement ses frères et sœurs mais aussi les autres individus avec lesquels il vit en contrôlant ses mouvements, sa morsure, ses coups de pattes. Comme l’enfant qui apprend à ne pas attraper les lunettes ou tirer les cheveux lorsqu’il est dans les bras, le chiot devra apprendre à ne pas faire mal lorsqu’il joue, à ne pas mordre. Mais aussi à rester calme, à attendre et se poser. Pour cela il faut qu’il ait des interactions avec d’autres individus, souvent la portée mais pas que, et qu’il y ait des adultes régulateurs pour donner des limites à ce qu’on peut faire ou ne pas faire. L’adulte, que ce soit la mère ou un autre chien, ne doit pas être présent ponctuellement mais en permanence au coté des chiots. Et il est important de le laisser réguler les interactions loin de notre vision humano-centrée. C’est ce qu’on appelle l’acquisition des auto-contrôles. Lors de l’adoption, les auto-contrôles ne seront que partiellement acquis. Il sera donc indispensable de poursuivre cet apprentissage en interdisant les mordillements et en favorisant le contrôle de l’excitation, la capacité à interrompre le jeu, à se poser.
Pendant cette même période va commencer l’apprentissage du langage canin. Le chiot va interagir avec les autres chiens et comprendre que certains de ses comportements auront des réponses positives ou négatives. D’abord autour de la gamelle de maman. Lorsqu’il va chercher à approcher de la gamelle, la mère va d’abord lui en refuser l’accès. Il va donc émettre tout un panel de comportements dont certains lui donneront accès à la gamelle car ils seront reconnus par la mère comme des comportements d’apaisement. Petit à petit le chiot intègrera ces comportements comme des demandes d’approche, d’interaction et de contact qui deviendront des signaux d’apaisement et de prises de contact une fois adultes. L’apprentissage des mots magiques comme le « s’il te plait – merci ». Cette acquisition du langage canin devra persister durant tout le développement du chiot et même après. Pour cela des contacts très fréquents avec d’autres chiens, en liberté, seront indispensables. C’est la première leçon : le chiot doit être en contact avec d’autres chiens. Et tant p*s s’il n’est pas parfaitement vacciné, sauf cas exceptionnel, les chiens mal socialisés aux autres chiens sont beaucoup plus fréquents que les leptospiroses et les maladies de Carré.
Petite remarque, un chiot de race de très grande taille devra être en contact avec des chiots et chiens de petite taille. Dans l’espèce canine, la taille des individus pouvant varier de facteur de un à cent, certains grands chiens oublient que les petits chiens sont des congénères et les considèrent comme des proies. D’où une socialisation spécifique à faire.
Dans la même optique, il y a la sociabilisation à l’espèce humaine. Normalement commencée chez l’éleveur, elle devra persister toute la vie du chien avec des contacts répétés, fréquents, toujours positifs avec des humains de tout style, tout sexe, tout taille. L’humain n’est pas une entité unique pour le chien mais une multitude d’individus. Plus le chiot aura rencontré d’individus différents dès son plus jeune âge, meilleure sera la sociabilisation. Il faut donc qu’il rencontre le plus rapidement possible et le plus souvent possible, en liberté autant que faire se peut et dans des conditions toujours positives tout un panel d’individus représentatifs de l’humanité. Ce n’est qu’à cette condition qu’il pourra vivre sans crainte dans un monde composé avant tout d’humains. C’est aussi le moment de lui faire rencontrer les autres animaux qui partageront son quotidien, le plus souvent des chats, parfois le lapin nain de la famille mais aussi les chevaux, les vaches, les moutons s’il est amené plus t**d à en rencontrer.
Le dernier point à aborder dans cette chronique est l’habituation à l’environnement dans lequel il va vivre. Le cerveau crée un filtre sensoriel qui lui permet de discriminer les différents signaux qui lui arrivent. Nous ne réagissons pas à tous les bruits, toutes les images qui stimulent nos sens en permanence. Un filtre va trier ce qui est normal, ce qui demande de la vigilance et ce qui demande une réponse. Ce filtre s’acquiert progressivement en fonction du milieu dans lequel on s’est développé et dans lequel on vit. Il doit correspondre à l’environnement. Il ne sera pas le même pour un individu vivant dans une maison à la campagne et pour celui qui vit dans un appartement en ville. Là encore il faudra faire vite car le temps permettant cette acquisition est limité. Sortir le chiot dans son nouvel environnement, le promener, le confronter aux différents lieux qui seront les siens. La rue avec ses bruits, ses poubelles sur le trottoir, ses voitures et ses cris d’enfants. On n’attendra pas qu’il soit plus grand ou vacciné pour le sortir. Dès les premiers jours, il doit découvrir son futur milieu. Et ceux d’autant plus s’il est issu d’un élevage isolé à la campagne comme c’est souvent le cas.
Elever un chiot, c’est une gageure pour nous qui vivons dans un monde parallèle au leur, un monde tellement différent que nous ne pouvons l’imaginer. Et pourtant nous leur demandons d’entrer dans notre monde, de s’adapter à nos vies. Les chiens sont incroyablement capables d’adaptation. Malgré tout il y a parfois des complications, des bases insécures, des erreurs d’éducation, des incompréhensions qui conduiront à un sentiment d’échec et parfois à l’abandon de l’animal.
Respecter ces premières consignes permet la création d’un socle solide pour le développement du chiot et une relation positive avec les humains.
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