24/05/2022
*** La décharge émotionnelle ****
-La comprendre, la déceler, la gérer -
Décharger ses émotions est un phénomène qui touche les chiens comme il nous touche également.
La décharge émotionnelle est un processus naturel qui permet la régulation en évacuant les tensions internes survenues suite à des situations émotionnelles compliquées. Lorsque nous vivons un moment de stress provoqué par un évènement extérieur, notre organisme va se mobiliser instinctivement d’une part en produisant un surplus d’énergie pour nous préparer à répondre sur un mode « action/réaction » (énergie musculaire) et, d’autre part, en nous informant (sous forme d’émotions) sur ce qui, chez nous, est mis en difficulté.
Au niveau biologique, cela se traduit par la sécrétion d'adrénaline et cortisol, hormones du stress. Le chien va chercher à rétablir son équilibre par différents comportements selon l'individu et selon l'origine du stress.
Cela se produit souvent lorsque le niveau d'éveil est élevé, que le chien est en état d'excitabilité ou en conflit interne, comme c'est le cas avec la frustration.
En pratique cela va se matérialiser par exemple par de l'agressivité redirigée sur congénères (ex: plusieurs chiens attendent au portail le passage du facteur, ils aboient, s'énervent les un les autres, créent beaucoup de bruit et de mouvement, jusqu'à ce que l'un deux ,ne supportant plus la tension, se retourne sur celui d'à côté pour le pincer, le mordre....) ou bien encore redirigée sur les humains (ex: un chien en laisse avec son propriétaire, visiblement réactif sur les véhicules, se mettant à sauter en bout de laisse pour atteindre une voiture qui passe un peu près, puis qui finit par se retourner sur le mollet de son humain).
La décharge émotionnelle est souvent liée à l'utilisation de la mâchoire. Ainsi , de certains chiens qui vont se mettre à mâcher frénétiquement leur longe ou leur doudou.
L'anxiété importante peut être à l'origine de décharge émotionnelle par exemple dans le cas de détresse d'isolement, le chien qui va détruire l'environnement.
Il faut bien intégrer que la tension est tellement forte que la décharge est irrépressible, le chien doit réaliser son comportement pour retrouver le calme intérieur. Comprendre cela engendre une prise en charge différente , et donc surtout pas dans la coercition => empêcher par la contrainte le comportement de décharge de se produire est une grande violence pour le chien. Pour son équilibre, avec les conséquences qui en découleront.
Il est à noter également que le stress important entraine une diminution de la dopamine, neurotransmetteur essentiel du circuit du plaisir et de la récompense. L'hypothèse est émise (origine Margot Fortin éthologue, CFCAC canin 2022) que les chiens pourraient alors réaliser des comportements hautement renforçant, c'est à dire pourvoyeurs de beaucoup de plaisir (et donc de sécrétion de dopamine ) , pour rétablir leur équilibre interne. Ce qui est le cas des comportements de prédation, ou encore de poursuite.
Pour gérer et diminuer ces décharges émotionnelles, il va falloir réduire le stress et l'état d'éveil de votre chien. Au niveau biologique, on va rechercher l'augmentation de la sécrétion de sérotonine, hormone du bien être, mais également inhibitrice des comportements agressifs.
Ainsi, nous en revenons toujours aux mêmes bases, réponses aux besoins, gestion de l'environnement.
Mais concrètement ?
* augmenter la sérotonine, diminuer l'adrénaline et le cortisol : longues balades au calme, mastication quotidienne, léchage, destruction d'objets comme des cartons, recherche olfactive, repos ....
sports canins => focus sur une tâche à accomplir.
* anticiper les situations à risque : lorsqu'on a plusieurs chiens et que l'un d'eux fait de l'agressivité redirigée, on va gérer les moments et les endroits clefs (passage de portes, repas, canapé .....)
* donner une activité de substitution : qui utilise la mâchoire si le chien à besoin de mordre : exemple le tug , ou bien apprendre au chien à laisser exploser son énervement sur un doudou. on proposera son utilisation en la renforçant, en dehors des moments de tension, jusqu'à pouvoir le sortir au moment opportun ou même que le chien aille de lui même rechercher son exutoire.
- Attention : nous sommes là bien souvent dans des situations dangereuses, ou qui pourraient déraper, l'aide d'un professionnel peut être indispensable. (parfois, il faut travailler conjointement avec un vétérinaire comportementaliste et la mise en place d'un traitement pour espérer des pogrès ). Mais comprendre les mécanismes qui sous-tendent ces comportements est important pour une bonne prise en charge.
- Il faut noter également que des recherches et des études sont en cours pour déterminer la part génétique chez certains chiens , de certaines races, avec par exemple certains gènes récepteurs de la dopamine chez le malinois.
En conclusion, on constate que ce n'est pas simplement un comportement agressif dont il faut s'occuper, mais de toute une chaine de réactions physiologiques dont il découle.