11/04/2024
petit partage du jour
🌿🐴 Je suis la gardienne de mes équidés. Et parfois, je suis fatiguée. 🐴🌿
Ce texte a 4 ans. Je l'ai écrit au printemps 2020, en plein confinement au moment ou je ne pouvais pas ramener mes juments comme prévu à coté de la maison. Je suis retombée dessus ce matin, une personne l'ayant repartagé dans un groupe. Et à la sortie de l'hiver que nous avons vecu cette année, je me suis dit que le partager à nouveau pouvait être pertinent. Bonne lecture.
J’avais juste envie de vous partager un ressenti, qui est je crois un peu tabou et pourtant, tellement important. Ce ressenti, je crois que chaque gardien d’équidé qui s’occupe lui-même de A à Z de ses chevaux ou de ses ânes et se soucie d’eux plus que de lui-même l’a un jour ressenti. Mais on en parle peu finalement.
De ce moment où, devant nos chevaux, on se dit qu’ils seraient mieux avec quelqu’un d’autre. Qu’on n’est pas à la hauteur. Et puis même, parfois, dans des moments où on craque, que notre vie serait plus simple, que ce serait peut-être mieux pour tout le monde s’ils étaient avec une personne qui saurait toujours quoi faire et trouverait des solutions, qu’importe le problème.
Ce moment où à la fin d’un hiver à charrier du foin, de l’eau et du fumier qu’il pleuve, qu’il vente, qu’il neige, on est fatigué. Ce moment où on se dit qu’on se bagarre contre une gale de boue mais qu’elle ne passera jamais parce qu’il pleut comme vache qui pisse depuis trois semaines et que malgré les zones stabilisées qui nous ont coûte un rein et un poumon, ça ne va pas. Et qu’une fois sorti de l’hiver, il faut gérer la transition à l’herbe, de façon à éviter les fourbures de printemps et les désordre moins graves. Qu’il faudra ensuite gérer les prairies pour les emmener en bonne santé jusqu’à l’année suivante, en évitant aussi les potentielles fourbures d’automne. Et quand nos équidés ont une santé fragilisée, une dermite, un SME, la PSSM, de l’emphysème ou toutes les pathologies possibles, ces questions ne nous quittent jamais.
Et puis arrivent les beaux jours et ce moment où on se dit qu’on irait bien faire une balade en sortant du boulot, et où notre cheval irait bien aussi. Mais qu’on a une clôture à réparer. Un coup de débroussailleuse à passer sur une zone de refus. Quelques pieds de rumex ou de séneçon de Jacob à arracher. Des crottins à ramasser. Le bois d’un abri à repasser sous une couche protectrice où à réparer.
Alors on laisse ses idées de balade pour une prochaine fois, et on s’y remet. Et parfois, malgré tout ça, des choses ne vont pas. Une boiterie. Un bobo qui ne passe pas malgré les soins. Des soins qui se passent mal, qui nous font nous énerver, énervant du coup notre cheval. Alors on regarde son compagnon, et une petite voix nous dit « Quelqu’un de plus compétent saurait sûrement mieux faire. Tu es nul(le) et tu ne les mérites pas ». Dans ces moment-là, la fatigue prend le dessus.
Je me suis longtemps culpabilisée toute seule quand j’avais ce ressenti. A m’en remettre une couche. A chaque fois que ça m’arrivait et m’arrive encore. Et puis à chaque fois, l’une de mes juments, deux, où les trois en même temps, vient me voir pour me rappeler que j’ai aussi le droit d’avoir mes limites. Que je suis humaine, et que les humains ça flanche parfois. Que ce n’est pas grave. Qu’elles me pardonneront mon énervement ou mes larmes ou le reste parce que le lendemain, je serai là, toujours, pour les soigner, les nourrir et m’assurer qu’elles vont bien.
Alors c’est vrai, parfois, je suis fatiguée. Parfois. Mais ce ne sont que quelques moments, dispersés au milieu de tant d’autres. Et ce n’est rien à côté le bonheur que j’éprouve les regardant galoper toutes les trois, heureuses et en bonne santé. Se laisser aller un moment ne veut pas dire abandonner. Douter ne veut pas dire renoncer. S’autoriser à ressentir le doute et la peur, c’est le seul moyen de les comprendre, de les accepter et de les laisser derrière nous.
Parce que nos compagnons à quatre jambes le comprennent bien mieux que la plupart des humains, l’important ce n’est pas d’être parfait, c’est de faire de son mieux, de tout son cœur.
Prenez soin de vous et de vos quatre pattes, à bientôt.